Aller au contenu
Séances précédentes
Séances précédentes
Séances précédentes

Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 122

Le jeudi 18 mars 1999
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 18 mars 1999

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La Journée internationale de la Francophonie

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, en cette Journée internationale de la Francophonie, le sénateur Comeau et moi-même vous demandons de bien vouloir nous permettre de faire une déclaration conjointe.

Aujourd'hui, l'honorable Gérald-A. Beaudoin a été reçu Chevalier de l'Ordre de la Pléiade. Ses réalisations, son engagement et son dévouement continuent à contribuer à l'épanouissement de la Francophonie au Canada.

Aujourd'hui également, c'est la première journée de l'Année de la Francophonie canadienne. Pour marquer cet événement, 12 parlementaires fédéraux de langue française - deux sénateurs, trois ministres et sept députés - se sont rendus à l'Assemblée nationale du Québec, hier soir. Nous voulions souligner les liens fraternels qui unissent tous les parlementaires de langue française d'un bout à l'autre du pays. La visite fut très appréciée de part et d'autre. Lors du souper qui a suivi la réception à l'Assemblée nationale, les parlementaires se sont présentés les uns aux autres. Ils nous ont tous laissé une réflexion. Nous aimerions vous faire part de quelques messages que nous avons entendus hier soir.

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, premièrement, là où nous pouvons être le plus utiles comme parlementaires engagés pour l'unité nationale du pays, c'est ici, à Ottawa. On nous invite à bien écouter les paroles des parlementaires québécois et à lire les comptes rendus de l'Assemblée nationale, pour, par la suite, agir en conséquence en tant que parlementaires fédéraux responsables.

Deuxièmement, hier soir, l'un des parlementaires fédéraux nous rappelait l'inquiétude profonde provoquée par le dernier référendum québécois, ce à quoi l'un des parlementaires de l'Assemblée nationale a répondu: «Nous, nous nous inquiétons tous les jours en entendant certains messages qui contribuent à la division du pays.»

Troisièmement, tous les parlementaires ont rappelé l'importance des institutions dans toutes les provinces et territoires du Canada qui desservent les minorités, que ce soit en communication, en éducation, en santé ou dans un autre domaine.

Quatrièmement, les parlementaires eux-mêmes étaient la preuve vivante que tous les Canadiens et toutes les Canadiennes reconnaissent la crédibilité des francophones vivant dans les provinces de l'Atlantique, du Québec, de l'Ontario et de l'Ouest. Rappelons-nous que le Gouverneur général du Canada est un Canadien français du Nouveau-Brunswick, que le Président du Sénat est un Canadien français du Manitoba, que le Président de la Chambre des communes est un Canadien français de l'Ontario, et que le premier ministre du Canada est un Canadien français du Québec.

Cinquièmement, le gouvernement fédéral a les outils et les ressources humaines nécessaires pour continuer à s'occuper activement de la culture canadienne-française.

Arrêtons de dire «Canada français et Canada anglais». C'est un mythe. Il y a des francophones fiers d'un bout à l'autre du Canada. Honorables sénateurs, bonne année de la Francophonie canadienne!

[Traduction]

Les droits de la personne

La Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je suis extrêmement fier et honoré d'être le premier d'une liste de sénateurs progressistes-conservateurs à intervenir aujourd'hui pour souligner l'importance du 21 mars, la journée choisie pour commémorer la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Le Parti progressiste-conservateur du Canada est depuis longtemps un chef de file mondial de l'adoption de mesures visant à mettre fin au racisme et de la promotion de l'égalité de tous les êtres humains. Je suis fier de savoir qu'après moi, des sénateurs progressistes-conservateurs de toutes les régions du Canada vont parler avec éloquence de cette importante convention.

(1410)

On se souviendra que les Nations Unies ont adopté cette convention à la suite de l'horrible massacre survenu à Sharpeville, en Afrique du Sud, le 21 mars 1960. Cette hécatombe avait attiré l'attention du monde sur l'oppression dont les Noirs étaient victimes dans ce pays dominé par une minorité blanche qui devait sa prospérité à l'apartheid.

Je voudrais employer les deux minutes qui me restent à dresser une courte liste de faits qui ont incité les nations du monde entier à adopter cette importante convention.

La convention repose sur le principe fondamental, énoncé dans la Charte des Nations Unies, dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, de la «dignité et de l'égalité de tous les êtres humains». Cette croyance en la dignité et en l'égalité de tous suppose la ferme conviction que toute doctrine fondée sur la supériorité raciale est «scientifiquement fausse, moralement condamnable et socialement injuste et dangereuse», que rien, nulle part, ne justifie, en théorie ou en pratique, la discrimination raciale et que tous les êtres humains doivent être égaux devant la loi. Ceci amène le principe voulant que toute personne détienne des droits et des libertés fondamentaux, indépendamment de toute distinction fondée, notamment, sur sa race, sa couleur ou son origine nationale ou ethnique.

S'inspirant de ces principes fondamentaux, les auteurs de la convention ont souligné les risques de l'inaction, rappelant que la paix et la sécurité internationales pourraient être menacées par la perpétuation de la discrimination fondée sur la race, la couleur et l'origine ethnique, et que cette discrimination pourrait faire «obstacle aux relations amicales et pacifiques entre États» et nuire à l'harmonie des rapports entre personnes vivant côte à côte dans un même État.

La convention n'est donc pas qu'un ensemble d'idées nobles, elle est aussi un appel à l'action. Les États signataires ont réitéré leur détermination à agir conjointement ou ensemble, en collaboration avec les Nations Unies, pour promouvoir et encourager le respect des droits de la personne et des libertés fondamentales pour tous, sans discrimination. Les États signataires ont insisté sur la nécessité d'«adopter le plus rapidement possible des mesures concrètes» pour réduire la discrimination raciale.

Ils ont renouvelé la condamnation du colonialisme et des pratiques de ségrégation et de discrimination contenue dans la Déclaration de 1960 sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux et ont promis d'agir sans tarder pour éliminer la discrimination raciale sous toutes ses formes, prévenir et combattre les doctrines raciales et édifier une communauté internationale libre de toute forme de ségrégation et de discrimination raciale.

Quatre décennies plus tard, la philosophie et l'inspiration qui sont à l'origine de la déclaration continuent de porter fruit. Le jour anniversaire du 21 mars, il sera de notre devoir de reconnaître, et même de proclamer les principes de l'égalité et de la dignité des humains, les dangers de la passivité et la nécessité de prendre des mesures concrètes.

L'honorable Mary Alice Butts: Honorables sénateurs, le dimanche 21 mars marquera la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale. Les Nations Unies ont proclamé cette journée pour commémorer le massacre, en 1960, de 69 personnes qui manifestaient paisiblement contre l'apartheid en Afrique du Sud. Depuis plus d'une décennie, le Canada a reconnu cette journée en engageant les jeunes Canadiens à lutter contre le racisme.

Selon un tout récent sondage, 85 p. 100 des Canadiens croient que l'élimination du racisme devrait faire partie de la politique du gouvernement. Honorables sénateurs, nous devons écouter les Canadiens.

Cette année marque également le troisième concours national de films vidéos sur l'élimination du racisme. Plus de 320 équipes de jeunes se sont déjà inscrites. Les participants doivent réaliser un film d'une minute dans lequel ils expriment leurs sentiments au sujet du racisme. Les dix équipes gagnantes participeront, dimanche prochain, Journée internationale pour l'élimination du racisme, aux émissions MuchMusic et MusiquePlus.

L'élimination du racisme est une priorité pour le gouvernement et, à notre avis, la meilleure façon d'y arriver est de donner à nos jeunes les outils dont ils ont besoin pour bâtir une société ouverte et respectueuse.

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, j'aimerais faire quelques commentaires sur cette journée des plus importantes. Je vous présenterai d'abord une brève rétrospective de la question.

Après la Seconde Guerre mondiale, les séquelles laissées par les horreurs des camps de concentration étaient lourdes et difficiles à faire oublier. Hantée par les images du génocide perpétré au coeur de l'Europe, la nouvelle Organisation des Nations Unies a pris dès 1948 des mesures en vue de rédiger une Déclaration universelle des droits de l'homme. Quinze ans plus tard, elle y adjoignait une Déclaration sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Cette déclaration a servi de base à une convention internationale adoptée par l'Assemblée générale le 21 décembre 1965, que le Canada a signée l'année suivante. La déclaration est entrée en vigueur le 24 octobre 1970.

L'appui du Canada à la nouvelle convention n'a surpris personne. Le Canada ayant été peuplé par des colons européens d'origines ethniques diverses qui ont été entourés de peuples autochtones, la question des liens entre les groupes raciaux et ethniques soulève l'attention depuis longtemps au pays. Ardent défenseur des Nations Unies, le Canada, patrie de John Humphrey, auteur de la version initiale de la Déclaration universelle des droits de l'homme, reconnaît l'importance du principe des efforts multilatéraux en vue de garantir les droits fondamentaux.

Ayant participé à la mise sur pied du nouveau Commonwealth des nations, le Canada était sensible aux forces naissantes de la décolonisation, aux nuances raciales présentes dans les politiques internationales et aux conflits internes, raciaux et ethniques opposant bon nombre de pays membres des Nations Unies.

À titre de puissance moyenne qui cherchait à maximiser son influence sur le monde en évolution, le Canada voulait maintenir des relations amicales avec les pays qui se sont affranchis du joug du colonialisme et de l'humiliation de l'assujettissement. Malgré la guerre froide et la menace de l'apartheid, il régnait toujours un sentiment d'interdépendance entre les nations; un idéal internationaliste commençait à se manifester et le Canada était prêt à apporter sa participation.

Enfin, en tant que pays dont la démographie changeait rapidement, et dont l'histoire a déjà été marquée par des moments difficiles de discrimination, y compris l'internement des Canadiens d'origine japonaise et d'autres origines durant la Seconde Guerre mondiale, le Canada avait un intérêt très clair dans toutes les initiatives qui promettaient d'améliorer les chances de parvenir à une harmonie interraciale.

L'évolution démographique était attribuable en grande partie aux changements en matière d'immigration. En 1962, le gouvernement Diefenbaker a décidé de supprimer les politiques d'immigration fondées sur la race. Les immigrants canadiens arrivaient déjà d'autres pays européens que la Grande-Bretagne et la France après la Première Guerre mondiale. Je suis parmi ceux-là. En 1971, ils représentaient 29 p. 100 de la population. À cela, il fallait ajouter les immigrants non européens, dont le nombre a presque quintuplé pour passer à environ 200 000 entre 1951 et 1971. Ces gens se sont joints à plus d'un quart de million d'autochtones au Canada.

La croyance du premier ministre Diefenbaker dans les droits fondamentaux et dans la non-discrimination avait des racines profondes. Dès 1947, il réclamait une Déclaration des droits et, en 1960, ce rêve est devenu une réalité. En parlant de la Déclaration des droits, M. Diefenbaker a déclaré:

Je suis Canadien, un Canadien libre, libre de m'exprimer sans crainte, libre de servir Dieu comme je l'entends, libre d'appuyer les idées qui me semblent justes, libre de m'opposer à ce qui me semble injuste, libre de choisir les dirigeants de mon pays. Ce patrimoine de liberté, je m'engage à le sauvegarder pour moi-même et pour toute l'humanité.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Di Nino, je suis désolé de vous interrompre, mais votre période de trois minutes est écoulée.

Le sénateur Di Nino: Puis-je terminer?

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Di Nino: Je vous remercie beaucoup, honorables sénateurs.

Il considérait la Déclaration des droits comme fondamentale à son idéologie de justice sociale et de développement national.

Le très honorable John Diefenbaker a dit d'une voix tonitruante, les bajoues tremblantes:

Un Canada qui était contre les préjugés à l'égard de quiconque et qui prônait la liberté pour tous. Il ne devait y avoir aucun citoyen de seconde zone, aucune distinction basée sur la race, les croyances religieuses ou la situation économique dans le Canada de mes rêves.

Étant donné son patrimoine, sa démographie et son leadership, il n'est pas surprenant que le Canada ait joué un rôle actif dans la formulation et la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

(1420)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suis désolé de vous informer que la période de 15 minutes réservée aux déclarations de sénateurs est écoulée. Cependant, je donne la parole à un autre sénateur.

[Français]

L'année internationale des personnes âgées

L'honorable Marisa Ferretti Barth: Honorables sénateurs, je m'adresse à vous aujourd'hui pour vous parler d'une de mes principales préoccupations en cette Année internationale des personnes âgées. Il s'agit des besoins spécifiques des aînés des communautés culturelles au Canada.

Mon expérience personnelle auprès d'eux m'a appris que leurs besoins sont souvent mal compris puisqu'ils sont très peu consultés par les décideurs de notre société. Pourtant, la cause des personnes âgées des communautés culturelles mérite une attention particulière puisque ces personnes cumulent à la fois les difficultés associées au vieillissement et celles reliées à leur statut d'immigrants.

Afin que la voix des aînés de différentes communautés culturelles soit entendue, j'organise, en collaboration avec le Conseil régional des personnes âgées italo-canadiennes, une journée de dialogue sur le vieillissement qui aura lieu demain à Montréal.

Lors de cette journée, des représentants de plusieurs communautés culturelles viendront nous parler des problèmes que les aînés de leurs communautés vivent. Nous avons également invité des représentants d'organismes communautaires et de la Régie régionale du ministère des Affaires sociales du Québec afin qu'ils soient sensibilisés à ces problèmes.

Par la suite, nous comptons faire un rapport des résultats de ce dialogue aux ministères et organismes de tous les paliers de gouvernement concernés.

En cette Année internationale des personnes âgées, j'invite tous les sénateurs à demeurer attentifs aux problématiques liées au vieillissement et à s'ouvrir aux difficultés particulières que vivent les aînés des diverses communautés culturelles.

[Traduction]

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, je demande la permission de faire une autre déclaration.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Une voix: Non.


AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur l'Agence des douanes et du revenu du Canada

Rapport du comité

L'honorable Terry Stratton, président du comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant:

Le jeudi 18 mars 1999

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a l'honneur de présenter son

DOUZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-43, Loi portant création de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, a, conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 10 mars 1999, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
TERRY STRATTON

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

L'ajournement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à mardi prochain, le 23 mars 1999, à 14 heures.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Affaires étrangères

Avis de motion portant autorisation au comité d'examiner la modification apportée au mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 23 mars 1999, je proposerai, avec l'appui de l'honorable John Stewart:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les ramifications pour le Canada:

1. de la modification apportée au mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et au rôle du Canada dans l'OTAN depuis la dissolution du pacte de Varsovie, de la fin de la guerre froide et de l'entrée récente dans l'OTAN de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque; et
2. du maintien de la paix, surtout la capacité du Canada d'y participer sous les auspices de n'importe quel organisme international dont le Canada fait partie.

Que le comité entende, entre autres témoins, le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense nationale et le chef d'état-major de la Défense;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les séances et les congés du Sénat;

Que le comité soit autorisé à permettre la diffusion électronique de ses délibérations publiques; et

Que le comité dépose son rapport final au plus tard le 29 octobre 1999.

[Français]

L'Afrique

Visite d'État du Gouverneur général en Côte d'Ivoire, en Tanzanie, au Mali et au Maroc-Avis d'interpellation

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 4 mai 1999, j'attirerai l'attention du Sénat sur mes observations et réflexions découlant d'un séjour de 16 jours en Afrique en compagnie de leurs Excellences le Gouverneur général du Canada, le très honorable Roméo LeBlanc, et de son épouse, Mme Diana Fowler LeBlanc, qui effectuaient une première visite d'État canadienne en Côte d'Ivoire, en Tanzanie, au Mali et au Maroc.

[Traduction]

Le rôle du Conseil de la magistrature

Les commentaires dans les médias-Avis d'interpellation

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, conformément aux paragraphes 56(1), 56(2) et 57(2) du Règlement du Sénat, je donne avis que, dans deux jours, j'attirerai l'attention du Sénat:

a) sur la lettre à la rédaction du National Post, le 13 mars 1999, intitulée: «Fair hearing» et signée par le juge en chef de la Colombie-Britannique Allan McEachern, président du comité sur la conduite des juges du Conseil canadien de la magistrature, en réponse à l'éditorial du 10 mars 1999 dans le National Post intitulé: «Hardly Impartial» à propos de M. le juge John Wesley McClung, de Mme la juge Claire L'Heureux-Dubé et du Conseil canadien de la magistrature.

b) sur la controverse publique qui se poursuit concernant le juge John Wesley McClung de la Cour d'appel de l'Alberta et de Mme la juge Claire L'Heureux-Dubé de la Cour suprême du Canada, et sur les rapports dans les médias à leur sujet;
c) sur l'entrevue et les commentaires du juge en chef Allan McEachern tels que rapportés dans l'article «Judges Must be Cyber-Warriors» paru le 26 février 1999 dans le Lawyers Weekly;
d) sur la question des déclarations publiques des juges dans les médias;
e) et sur la notion et les principes de l'indépendance judiciaire et sur les droits du Parlement à cet égard.

Le Tribunal pénal international sur les crimes commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda

La position de Mme la juge Louise Arbour-Avis d'interpellation

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, conformément aux paragraphes 56(1), 56(2) et 57(2) du Règlement du Sénat, je donne avis que, dans deux jours, j'attirerai l'attention du Sénat:

a) sur l'article paru le 28 février 1999 dans le Calgary Herald signé par David Paddon et intitulé: «Troops needed to assist tribunal, says Arbour» et sur la demande de Mme la juge Louise Arbour d'obtenir des troupes internationales pour l'aider dans ses enquêtes au Kosovo en tant que procureure en chef pour les Nations Unies du Tribunal pénal international sur les crimes commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda;

b) sur la situation d'un juge canadien qui désire exercer force et coercition et mobiliser des troupes militaires, et sur les instruments militaires de l'État, et sur la relation entre le recours à des forces armées par un juge canadien et le rôle des juges en vertu de la Loi sur les juges;
c) sur le projet de loi C-42 (1996) et l'exemption unique par le Parlement de l'application de la Loi sur les juges afin d'autoriser Mme la juge Louise Arbour à assumer les fonctions de procureure en chef pour les Nations Unies du Tribunal pénal international sur les crimes commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda;
d) sur l'article paru le 16 mars 1999 dans le Globe and Mail, signé par Kirk Makin et intitulé: «Louise Arbour's Supreme Decision: The Celebrity judge would be a superstar candidate for the top court, but is the time right for her?», et sur des rapports dans les médias concernant les présumés désirs de Mme la juge Arbour, et sur les possibilités qu'elle soit nommée à la Cour suprême du Canada lorsque le juge Peter Cory prendra sa retraite;
e) et sur les commentaires des juges dans les médias au sujet des dossiers d'intérêt public et sur les activités internationales des juges canadiens et sur la notion d'indépendance judiciaire des juges canadiens.
(1430)

La position international dans le domaine des communications

Avis de motion visant à autoriser le comité des transports et des communications à reporter la date de son rapport final

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion:

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 23 mars 1999, je proposerai:

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 1er décembre 1998, le Comité permanent des transports et des communications, autorisé à examiner, pour en faire rapport, la position internationale concurrentielle du Canada dans le domaine des communications en général, et notamment à étudier l'importance des communications au Canada sur les plans économique, social et culturel, soit habilité à présenter son rapport final au plus tard le 30 mai 1999; et

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer son rapport auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances nationales

Le projet de loi portant création de l'Agence des douanes et du revenu du Canada-Le coût de la rédaction de discours appuyant le projet de loi-L'application de la taxe sur les produits et services-La position du président du comité

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai une question pour le leader du gouvernement au Sénat. Le leader pourrait-il confirmer ou démentir qu'un contrat de 23 000 $ a été conclu par Revenu Canada pour la rédaction de deux discours sur le projet de loi C-43, et pourrait-il nous dire si la TPS s'appliquait à cette somme?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je devrai évidemment me renseigner avant de donner une réponse à cette question. Je suis désolé.

Si la TPS s'applique à ce genre de contrat, elle a certainement été appliquée.

Le sénateur Kinsella: J'ai une question complémentaire qui s'adresse au président du comité sénatorial permanent des finances nationales. Est-ce que le président de ce comité, qui étudie le projet de loi C-43, a des renseignements sur cette même question? Sait-il si l'un de ces deux discours, qui ont coûté 23 000 $, est celui qui figure sur le site Internet de Revenu Canada et qui est censé être le discours prononcé par notre honorable collègue le leader adjoint du gouvernement - qui n'est toutefois pas celui qui se trouve dans le hansard?

L'honorable Terry Stratton: Je vous remercie de votre question. Tout ce que je peux dire c'est que, selon les renseignements que j'ai reçus, Revenu Canada a préparé deux discours sur le projet de loi C-43 et que le contrat s'élevait au total à 23 200 $ plus la TPS.

Quant à savoir si ces discours ont été utilisés sur Internet, je suis encore en train d'essayer de le confirmer. Comme deux discours ont été préparés, il semblerait que le sénateur Carstairs en ait fait un dans cette Chambre et que Revenu Canada ait publié l'autre sur Internet.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire pour le leader du gouvernement au Sénat. Puisque le gouvernement paie si bien les rédacteurs de discours, aimerait-il se joindre à moi pour former un nouveau partenariat et reprendre notre ancien métier?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je serai très heureux de le faire. En fait, la pensée m'est venue immédiatement à l'esprit. Aussitôt que le sénateur Kinsella a posé la question et que le sénateur Sratton y a répondu, je me suis tourné à ma droite et j'ai demandé à madame le leader adjoint si elle avait payé la TPS. Cependant, elle n'avait évidemment rien à voir avec cela.

Il existe manifestement un nègre quelque part. Le tarif est certainement meilleur que celui qu'on nous payait autrefois au journal The Casket d'Antigonish.

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, on sent vraiment un certain manque de sérieux autour de cette question, mais à la place du sénateur Carstairs, je serais un peu fâché au lieu de trouver cela drôle.

Quand j'entends le sénateur Murray et le sénateur Graham en parler, je suis frappé par l'injustice que présente cette situation. Le Sénat, pour accomplir son travail, dépense un certain montant d'argent, et nous avons été critiqués presque partout dans le monde à cause de cela. Nous apprenons maintenant que le gouvernement dépense un montant aussi indécent pour faire rédiger un discours.

Le leader du gouvernement au Sénat aurait-il l'obligeance de nous dire si cela se produit habituellement et, s'il n'a pas la réponse, pourrait-il chercher à le savoir pour nous?

Le sénateur Graham: Je suis d'accord avec la description que le sénateur Di Nino fait de ce montant en le qualifiant d'indécent.

Je ne sais pas s'il s'agit d'une pratique courante, mais s'il y a quelque vérité dans ces allégations, nous devrions certes chercher à le savoir et les porter non seulement à l'attention du Sénat, mais aussi à l'attention du public.

Je suis d'accord avec le sénateur Di Nino pour dire que la situation présente un élément d'injustice, car il y a tellement de travail utile qui s'effectue au Sénat qui n'est pas reconnu. Ce travail est effectué non pas seulement par les sénateurs, mais aussi par leurs recherchistes et par les comités qui travaillent dans l'intérêt public au nom du Sénat.

La défense nationale

L'accumulation de factures impayées-Le déficit budgétaire de l'armée attribuable aux secours aux sinistrés-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse également au leader du gouvernement au Sénat.

Il a été révélé l'autre jour, grâce à des questions posées à l'autre endroit, que le budget de la défense comptait 600 millions de dollars de plus, d'après les prévisions des dépenses de 1999-2000. Comme on lui demandait pourquoi les nouvelles dépenses n'avaient pas été annoncées, le gouvernement a prétendu que l'argent frais était destiné aux secours aux sinistrés, mais que l'armée n'a reçu que 184 millions de dollars en financement supplémentaire.

Ces 184 millions sont-ils destinés à couvrir le déficit du budget de fonctionnement de l'armée? Est-ce la raison pour laquelle la Défense nationale ne peut payer ses factures à temps? A-t-elle manqué d'argent?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Je crois savoir qu'il y a eu au ministère de la Défense nationale une accumulation de factures à payer. C'est ce que je me rappelle avoir lu dans des dossiers il y a un certain temps, mais je crois que le problème a été réglé.

Un chiffre de 377 millions de dollars a précédemment été mentionné. C'est le montant qui a été consacré aux secours aux sinistrés dans diverses régions.

Quant aux 184 millions, il faudrait que je pousse mes recherches pour savoir de quoi il retourne.

Les déficits budgétaires des Forces canadiennes-Demande de réponses aux questions inscrites au Feuilleton

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai des questions inscrites au Feuilleton depuis le 21 octobre 1997. L'une d'elles, la question no 57, porte sur les déficits budgétaires de l'armée. La question no 129 concerne le déficit des Forces canadiennes et a été inscrite le 15 juin 1998. Lorsque mes collaborateurs ont demandé au service des affaires parlementaires du MDN où en étaient ces questions, on leur a répondu que la réponse à la question no 57 avait subi un certain nombre de révisions.

Le gouvernement est-il trop embarrassé pour répondre à mes questions sur le déficit du budget de l'armée? Pourquoi toutes ces révisions? Combien de temps encore faudra-t-il attendre une réponse à une question fort simple?

(1440)

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le gouvernement n'est pas embarrassé le moindrement. Je regrette beaucoup qu'on n'ait pas encore répondu aux questions posées par l'honorable sénateur Forrestall. Je vais certes approfondir la question aujourd'hui, dès que le Sénat se sera ajourné.

Les droits de la personne

La Convention internationale sur l'élimination de la discrimination raciale-La possibilité d'intervenir au nom de dissidents cubains-La position du gouvernement

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je regrette qu'un certain sénateur ne m'ait pas permis de présenter aujourd'hui ma déclaration, car cela m'a empêchée de féliciter le gouvernement pour avoir pris d'excellentes mesures conformément à l'article 5 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Canada, le gouvernement fédéral, a pris d'excellentes mesures pour se conformer à cette convention en décidant de travailler à l'élimination de toutes les formes de discrimination et de toutes les violations des droits de la personne au sein du forum multilatéral.

Le gouvernement envisagera-t-il de prendre des mesures pour qu'un rapporteur spécial examine ce qui se passe à Cuba?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, c'est avec grand plaisir que je porterai cette affaire à l'attention de mon collègue, le ministre des Affaires étrangères. Le sénateur n'ignore pas que nous sommes en train de réexaminer nos relations avec Cuba par suite du procès, de la condamnation et de l'emprisonnement, récemment, de quatre ressortissants cubains. Le Canada prend très au sérieux toute la question de ses relations avec Cuba. Nous croyons qu'il vaut mieux maintenir notre engagement.

Pendant que cette affaire est à l'étude, les visites que devaient faire à Cuba les ministres Marleau et Marchi, je crois, ont été temporairement remises. Cela montre déjà très bien à Cuba que nous prenons de tels incidents très au sérieux.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, le Canada entretient un dialogue constructif avec Cuba. Jusqu'à maintenant, nous avons pris les déclarations cubaines au pied de la lettre. La Commission des droits de la personne se penchera sous peu sur ces questions. Il me semble que, pour envoyer un rapporteur, il faut avoir la permission de Cuba. Ce serait là une excellente occasion pour le Canada de montrer à Cuba et au monde entier qu'il prend les conventions internationales au sérieux.

Le sénateur Graham: Je suis d'accord avec le sénateur Andreychuk et je porterai l'affaire à l'attention de mes collègues.

L'amélioration de la situation de la démocratie au Timor oriental-Le rôle du gouvernement

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je voudrais poursuivre dans le même esprit, notamment à l'occasion de cette journée spéciale et de l'année spéciale au cours desquelles nous soulignons les efforts accomplis dans la lutte contre la discrimination raciale et en faveur des droits humains et des droits en général.

Le vent de changement démocratique qui semble provenir de l'Indonésie, particulièrement au sujet du Timor oriental, a de quoi nous réjouir. Espérons que ma question permettra d'illustrer la bonne besogne accomplie par le Canada.

Quel rôle le Canada a-t-il joué pour favoriser ce merveilleux vent de changement démocratique qui souffle sur cette région du globe? C'est peut-être un bon présage pour l'Asie.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le Canada a joué un rôle prépondérant. Je crois savoir que le ministre des Affaires étrangères, M. Axworthy, a maintes fois évoqué ce dossier avec ses collègues.

La question du sénateur Di Nino me rappelle que plusieurs groupements internationaux - l'Internationale socialiste, l'Internationale libérale, les conservateurs, les démocrates-chrétiens et plusieurs autres - ont soulevé la question lors de leurs réunions internationales. Ils ont fait des démarches énergiques à propos de la situation au Timor oriental. Je sais pertinemment que le ministre des Affaires étrangères a joué un rôle très actif dans ce dossier.

La liberté religieuse au Tibet sous l'occupation chinoise-La position du gouvernement

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je tiens à féliciter le gouvernement - cela ne m'arrive pas très souvent dans les dossiers de cette nature - à propos de Cuba et du Timor oriental.

J'ai une question complémentaire. Le ministre pourrait-il nous nous dire - ou à tout le moins se renseigner - si les mêmes pressions sont exercées ou si la même approche est utilisée vis-à-vis de la Chine à l'égard du Tibet?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, mon honorable ami sait sans doute, d'après les discussions qui ont eu lieu antérieurement, que le Canada s'inquiète beaucoup de la situation des droits de la personne en Chine, y compris au Tibet. Notre politique en ce qui concerne le Tibet est de faire pression en faveur d'un plus grand respect des droits de la personne en Chine en général et au Tibet en particulier. Le respect des droits de la personne et de la liberté de religion est un objectif important de la politique bilatérale et multilatérale du Canada.

Le Canada continuera, par l'entremise du comité des droits de la personne Canada-Chine, de faire pression sur le gouvernement chinois afin qu'il respecte le droit à la liberté de religion de toutes les minorités ethniques de la Chine. Nous insistons auprès de la Chine afin qu'elle ratifie le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, je crois comprendre que des discussions bilatérales ont lieu entre le Canada et la Chine à cet égard. Le ministre s'engage-t-il à s'enquérir auprès du ministre des Affaires étrangères ou du cabinet du premier ministre pour savoir si un représentant de cet organe - peut-être un sénateur de n'importe quel côté de la Chambre - pourrait assister à ces réunions à titre de participant ou d'observateur?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, j'en prends note. Je ferai remarquer que l'ambassadeur du Canada s'est rendu en visite au Tibet au printemps dernier. Il a fait part des préoccupations du Canada lors de toutes les réunions qu'il a eues avec les autorités gouvernementales et donne ses impressions sur la situation au Tibet dans son rapport. Si cela intéresse l'honorable sénateur Di Nino, j'essaierai de me procurer un exemplaire du rapport en question.

Les anciens combattants

Le régime d'indemnisation des anciens combattants de la marine marchande-La position du gouvernement

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, en tant que sénateur représentant le Nouveau-Brunswick, je voudrais demander au leader du gouvernement au Sénat s'il sait si le ministre responsable a étudié la demande de nos anciens combattants de la marine marchande, qui réclament depuis longtemps un régime d'indemnisation?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'imagine que ma collègue parle du ministre des Anciens combattants. Le gouvernement a proposé un projet de loi qui nous fournira une belle occasion de poser directement la question au ministre, si c'est lui qui comparaît devant le comité compétent.

Le sénateur DeWare: Honorables sénateurs, la recommandation du ministre me plaît, car j'ai remarqué que le projet de loi ne prévoyait pas le régime d'indemnisation qui est réclamé.

L'industrie

Les déclarations du ministre concernant les problèmes de productivité-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur la productivité. Le mois dernier, le ministre de l'Industrie, M. Manley, a déclaré que le Canada affichait la plus faible augmentation de productivité de tous les pays du G-7. Cela a été confirmé par les sondeurs du premier ministre, mais voici qu'aujourd'hui, le ministre des Finances affirme que ce n'est pas le cas.

Le ministre pourrait-il nous dire si le gouvernement canadien pense que la productivité pose problème?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la productivité est toujours un problème, mais je tiens à rappeler, comme je l'ai fait à plusieurs occasions déjà, que l'objectif principal du gouvernement depuis 1993 consiste à assurer un meilleur niveau de vie aux Canadiens.

Nous avons hérité d'un taux de chômage écrasant et d'un déficit galopant. Nous avons pris les mesures nécessaires pour régler ces problèmes et assurer un meilleur avenir aux Canadiens. Nous avons transformé un déficit de 42 milliards de dollars en un excédent. Nous avons commencé à réduire les taxes et les impôts. Nous avons investi plus d'argent dans la recherche, le développement et l'éducation. Nous avons investi plus d'argent dans les soins de santé. Nous avons amélioré le sort des enfants canadiens au moyen de la prestation fiscale pour enfants.

(1450)

Selon Statistique Canada, en 1997, la productivité au Canada a augmenté de 2,9 p. 100. C'est considérable.

Même si le sénateur Oliver vient de la Nouvelle-Écosse, je vais donner un exemple de productivité pour l'édification des sénateurs des autres régions de notre pays qui, comme Thomas, pourraient douter.

Il y a trois semaines, j'ai eu le privilège de participer à l'inauguration du prolongement d'une usine de Magna International à North Sydney, au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, en compagnie du président de l'entreprise.

L'usine emploie 157 travailleurs du Cap-Breton. Lorsque le président de Magna est venu à l'usine, je l'ai rencontré avant l'inauguration. Je lui ai demandé comment il cotait la productivité de la main-d'oeuvre au Cap-Breton. Il m'a dit que Magna possède environ 150 filiales dans le monde et qu'il considérait la productivité de la main-d'oeuvre au Cap-Breton comme bonne, sinon supérieure à celle de toute autre usine dans le monde.

Le sénateur Oliver: Honorables sénateurs, que pense le ministre des propos du ministre Manley, qui dit que notre économie est chancelante et qui la compare à celle du Mississipi? Que pense-t-il des déclarations du ministre Manley selon lesquelles le Canada affiche le plus faible taux de croissance de la productivité parmi les pays du G-7? Pourrait-il répondre directement à ces questions?

Le sénateur Graham: Dans cette Chambre et au Canada, nous devrions être unanimes dans notre détermination à tabler sur les améliorations récentes dont je viens de parler et que nous avons constatées par rapport à la productivité partout dans le pays. Le gouvernement veut bâtir une économie plus forte, où les revenus seront en hausse, où des emplois continueront d'être créés et où tous les Canadiens verront leur niveau et leur qualité de vie s'améliorer.

Réponse différée à une question orale

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai la réponse à une question que l'honorable sénateur Kinsella a posée le 3 mars 1999 au Sénat au sujet du rapport du Département d'État américain sur le bilan de divers pays en ce qui concerne le traitement des autochtones.

Les droits de la personne

Le rapport du Département d'État américain sur le bilan de divers pays-La mention des incidents d'arrestation à Vancouver et du traitement des autochtones-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Noël A. Kinsella le 3 mars 1999)

Ce rapport annuel américain mentionne de nombreuses inquiétudes concernant les droits de l'homme dans des douzaines de pays. En 1998, le rapport n'avait en général que des éloges à faire au sujet du respect des droits de l'homme au Canada. Cependant, il a fait état de quelques plaintes, notamment en matière de discrimination contre les autochtones, les personnes handicapées et les femmes.

Dans chaque cas cité, le rapport notait que les pouvoirs publics au Canada prennent des mesures pour remédier aux problèmes ou que les lois canadiennes et un organe judiciaire indépendant y pourvoient.

Le gouvernement fédéral donne suite aux trois quarts (335) des recommandations, soit par des politiques et des programmes déjà établis ou d'initiatives dans le cadre de «Rassembler nos forces: le plan d'action du Canada pour les questions autochtones», qui a été annoncé en janvier 1998. Il convient de souligner que seulement le quart des recommandations visaient exclusivement le gouvernement fédéral.

Le document «Rassembler nos forces», réponse du gouvernement fédéral à la CRPA, énonce les engagements du gouvernement sous quatre thèmes: le renouvellement des partenariats; le renforcement de la gestion publique par les autochtones; l'établissement de nouvelles relations fiscales; et le renforcement des collectivités, des peuples et des économies. Depuis un an, nous avons établi les fondements d'un changement durable concernant ces quatre grands thèmes. Notre défi consiste maintenant à tabler sur les fondements que nous avons établis avec les gouvernements, les autochtones, le secteur privé et les particuliers, de manière à apporter des améliorations concrètes à la vie des Métis, des membres des Premières nations et des Inuit d'un bout à l'autre du pays. Plusieurs ministères fédéraux répondent aux besoins des autochtones à la lumière de «Rassembler nos forces»; c'est le cas, notamment, du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, de Patrimoine Canada, de Pêches et Océans Canada, de Santé Canada, de Développement des ressources humaines Canada, d'Industrie Canada, de Justice Canada, de Ressources naturelles Canada, du Solliciteur général du Canada et de Statistique Canada.

Dépôt des réponses à des questions inscrites au Feuilleton

Le cabinet du premier ministre et le Bureau du Conseil privé-Le nombre des récipiendaires d'une prime de rendement de la fonction publique

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 68 inscrite au Feuilleton par le sénateur Phillips.

Le Conseil du Trésor-Le nombre des primes de la fonction publique versées aux fonctionnaires

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 69 inscrite au Feuilleton par le sénateur Phillips.

Les finances nationales-Le compte de pension de retraite des Forces canadiennes-Les motifs du prélèvement-La position du gouvernement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 139 inscrite au Feuilleton par le sénateur Forrestall.

Le Conseil du Trésor-Le nombre et le montant de la rémunération au rendement dans la fonction publique et des primes au bilinguisme versées en 1995-1996 et 1996-1997

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 109 inscrite au Feuilleton par le sénateur Phillips.

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune d'un groupe de membres de l'Association des marins marchands du Canada, qui est dirigé par M. Ossie MacLean. Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat.

Des voix: Bravo!


ORDRE DU JOUR

La Loi sur la sécurité ferroviaire

Projet de loi modificatif-Troisième lecture

L'honorable Marie-P. Poulin propose: Que le projet de loi C-58, Loi modifiant la Loi sur la sécurité ferroviaire et une autre loi en conséquence, soit lu une troisième fois.

- Honorables sénateurs, je tiens à exprimer mon appui au projet de loi C-58, qui est à l'étape de la troisième lecture. Tout d'abord, il est essentiel de reconnaître le rôle capital que les membres des comités permanents du Sénat et de la Chambre des communes ont joué en examinant dans le détail le projet de loi pour s'assurer qu'il est dans l'intérêt de tous les Canadiens.

[Français]

En 1994 et 1997, des experts indépendants en matière de sécurité et des professionnels oeuvrant au ministère des Transports ont procédé à deux examens approfondis de la Loi sur la sécurité ferroviaire. Ces examens ont confirmé la validité des principes de base de la loi. Dans les deux examens, les excellents résultats de l'industrie ferroviaire canadienne en matière de sécurité ont été reconnus.

De plus, tout au long de la préparation du projet de loi C-58, des représentants du ministère des Transports se sont entretenus avec l'industrie ferroviaire, les syndicats des cheminots, la Fédération canadienne des municipalités, le Conseil canadien de la sécurité, Transport 2000, des fonctionnaires provinciaux et j'en passe. Ils ont tous grandement contribué à élaborer ce projet de loi amélioré.

Ainsi, les séances de consultation avec les parties intéressées ont constitué une occasion d'établir un consensus sur l'objet des modifications qui sont proposées à la Loi sur la sécurité ferroviaire. Ces modifications correspondent aux meilleures pratiques des régimes de sécurité des autres modes de transport.

[Traduction]

Honorables sénateurs, tout au long du processus législatif, de nombreux témoins ont exprimé leur appui à l'égard de ce qu'ils estimaient être un bon projet de loi. Les intervenants ont vanté le processus d'élaboration de cette mesure législative. Ils ont particulièrement apprécié la possibilité d'exprimer toutes leurs préoccupations.

Les avantages de cette vaste consultation ont été amplement démontrés par la participation des intervenants, qui ont veillé à ce que la nouvelle mesure législative réponde à leurs préoccupations. Par exemple, les membres du Comité sénatorial permanent des transports et des communications ont rencontré les représentants de l'Association des chemins de fer du Canada pour connaître le point de vue de l'industrie sur le projet de loi C-58. Encore une fois, les intervenants ont fait savoir au comité, durant les audiences, qu'ils souscrivaient entièrement au projet de loi.

Comme l'a fait observer le Bureau de la sécurité des transports à l'automne 1997, le Canada a un bilan enviable en matière de sécurité ferroviaire. Un comité d'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire a été établi pour examiner le nouveau régime de sécurité. Il a conclu dans son rapport final que le transport ferroviaire au Canada était sûr, comparativement aux modes de transport qui lui font concurrence et au transport ferroviaire dans d'autres pays.

Pour continuer d'améliorer ce bilan, les inspecteurs du ministère continueront de surveiller le rendement en matière de sécurité de toutes les sociétés ferroviaires d'un bout à l'autre du Canada. Transports Canada continuera également de prendre des mesures pour combler les lacunes de sorte que la sécurité du réseau canadien des transports ne soit pas compromise.

Honorables sénateurs, je suis heureuse de signaler à mes collègues que, après un examen approfondi, le comité permanent des transports et des communications a approuvé le projet de loi C-58 tel quel.

[Français]

Pour conclure, honorables sénateurs, je réitère ce qui a déjà été dit maintes fois, à savoir que la priorité de Transports Canada est la sécurité du réseau du transport canadien. Le ministère continuera, comme il l'a fait par le passé, à travailler en étroite collaboration avec l'industrie et tous les autres intervenants pour veiller à ce que la sécurité ne soit pas compromise.

Grâce à l'adoption de ces modifications à la Loi sur la sécurité ferroviaire, les Canadiens profiteront d'un cadre réglementaire renforcé qui régira la sécurité de ce mode de transport essentiel. De plus, ce cadre fournira au ministère les moyens de veiller à ce que les chemins de fer canadiens continuent d'améliorer leur rendement en matière de sécurité au moment où nous nous dirigeons vers le XXIe siècle.

[Traduction]

Je suis heureuse de voir l'évolution de ce projet de loi et d'y accorder mon appui afin qu'il connaisse du succès. Par conséquent, je prie mes honorables collègues d'appuyer ce projet de loi pour qu'il reçoive la sanction royale dans les meilleurs délais.

Son Honneur le Président: Si aucun autre honorable sénateur ne désire prendre la parole, je passerai à l'adoption de la motion.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

[Français]

La Loi sur les allocations aux anciens combattants
La Loi sur les pensions
La Loi sur les avantages liés à la guerre pour les anciens combattants de la marine marchande et les civils
La Loi sur le ministère des Anciens combattants
La Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel)
La Loi sur la prise en charge des prestations de la Commission de secours d'Halifax

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'honorable Aurélien Gill propose: Que le projet de loi C-61, Loi modifiant la Loi sur les allocations aux anciens combattants, la Loi sur les pensions, la Loi sur les avantages liés à la guerre pour les anciens combattants de la marine marchande et les civils, la Loi sur le ministère des Anciens combattants, la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), la Loi sur la prise en charge des prestations de la Commission de secours d'Halifax et d'autres lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je suis vraiment très heureux de prendre la parole au Sénat pour la première fois et d'avoir, en outre, le privilège d'aborder un sujet qui vise avant tout les citoyens qui font honneur à notre pays, les anciens combattants et les personnes à leur charge. Je veux évidemment parler du projet de loi C-61, que je considère comme une excellente mesure législative.

L'occasion nous est rarement fournie de discuter d'un projet de loi pour lequel nous n'avons pas matière à opposition, quelle que soit notre couleur politique. Nos collègues de la Chambre des communes étaient plus que convaincus de l'importance de son adoption, car ils en ont fait l'étude rapidement à toutes les étapes.

J'ose croire que nous pourrons rendre hommage à nos anciens combattants de la même manière en faisant nous aussi preuve de diligence.

[Traduction]

L'histoire de notre pays est marquée par le sacrifice de jeunes hommes et de jeunes femmes qui ont lutté pour le maintien de la paix et de la liberté tout au long du siècle. Elle est marquée par le sang qu'ils ont versé en terre étrangère partout dans le monde. Elle est vivace pour les personnes qui se rendent dans un des cimetières du Commonwealth que l'on trouve partout dans le monde, où de simples pierres tombales marquent le lieu de repos d'anciens combattants canadiens qui ont donné leur jeunesse afin que d'autres puissent vivre libres. D'innombrables pays y ont rendu honneur en érigeant des monuments à la mémoire de nos citoyens qui ont sacrifié leur vie pour défendre les foyers, le territoire et les familles de ces pays.

[Français]

Plusieurs d'entre eux sont morts dans la fleur de l'âge: au cours de la Première Guerre mondiale, 66 000 personnes, au cours de la Deuxième Guerre mondiale, 45 000 personnes et, en Corée, plus de 500 personnes. De nombreux autres ont en outre péri dans le cadre d'opérations de maintien de la paix qui sont associées au service militaire canadien depuis la deuxième moitié de ce siècle. Les blessés, de corps et d'esprit, se comptent par milliers.

À quel coût? Une jeunesse perdue pour toujours, des familles qui n'ont jamais pu être constituées, des mères et des pères qui ont perdu des filles et des fils, des épouses qui ont perdu leur mari, des enfants qui ont perdu leurs parents. Une nation qui compromet sa prochaine génération: voilà le prix de la guerre, voilà aussi le prix de la liberté.

[Traduction]

Nous avons donc conclu avec ces anciens combattants un pacte prévoyant qu'à leur retour au pays, nous les aiderions à rattraper le temps perdu, nous panserions leurs plaies et nous les aiderions à repartir à neuf. Dans l'ensemble, les Canadiens et les gouvernements qui se sont succédé se sont assez bien acquittés de cette promesse. Au fil des ans, il a été reconnu que les avantages consentis aux anciens combattants par le Canada comptaient parmi les meilleurs au monde.

[Français]

Par exemple, si un ancien combattant ou un militaire en service est blessé ou tombe malade suite à son service, il est admissible à une pension d'invalidité. Les anciens combattants du temps de guerre qui, en vieillissant, voient fondre leurs revenus ont droit à une allocation d'anciens combattants. Plusieurs peuvent recevoir de l'aide pour demeurer dans leur foyer le plus longtemps possible grâce aux avantages accordés dans le cadre du Programme d'aide à l'autonomie des anciens combattants. Beaucoup d'autres reçoivent des prestations médicales qui complètent celles qui sont offertes en vertu des programmes provinciaux et ont aussi accès à des lits dans des établissements de soins de longue durée lorsqu'ils ne peuvent plus demeurer chez eux.

Il ne s'agit là que de quelques-uns des programmes de base qui sont en vigueur depuis des années et qui continuent d'assurer des services essentiels à des Canadiens très spéciaux.

À l'aube du prochain siècle, nous constatons avec tristesse et résignation que nous perdons de plus en plus d'anciens combattants du temps de guerre. L'âge moyen de ceux qui restent atteindra bientôt 80 ans. Leurs besoins changent; voilà pourquoi, en partie du moins, le projet de loi C-61 doit être adopté rapidement. Par ses dispositions, le projet de loi reconnaît le passage des années et ses conséquences sur les anciens combattants et les personnes qui leur survivent.

Permettez-moi maintenant de parler de certains détails du projet de loi. Les veuves d'anciens combattants, qui pourraient être admissibles à des majorations de leur pension de survivant, seront parmi les principales bénéficiaires de ce projet de loi. Après l'adoption du projet de loi, la Loi sur les pensions sera modifiée afin de permettre aux survivants de présenter des demandes de majoration de pension s'ils estiment que l'invalidité de leur conjoint, au moment de son décès, aurait dû être évaluée à un degré supérieur. Cette disposition pourrait avoir pour effet d'améliorer les soins et le confort de milliers de veuves dans leur vieillesse. Ce n'est là qu'un modeste gage de l'attention que nous portons à leur bien-être. En fait, cette modification nous a été instamment suggérée par la Légion royale du Canada, et nous sommes heureux de nous rendre à son v9u.

Les anciens prisonniers de guerre profiteront aussi de l'adoption de ce projet de loi. À mesure qu'ils vieillissent et que leur santé s'étiole, les anciens prisonniers de guerre pourront maintenant recevoir une allocation pour soins qui les aidera à assurer leurs soins personnels. En outre, les anciens combattants de cette catégorie qui répondent aux critères seront admissibles à une allocation d'incapacité exceptionnelle s'ils deviennent extrêmement invalides en raison du passage des ans et de l'apparition de maladies débilitantes. Le montant de ces allocations sera fondé sur le degré d'invalidité et sur ses effets sur leur qualité de vie. Auparavant, ces allocations n'étaient offertes qu'aux anciens combattants qui touchaient déjà une pension d'invalidité. Nous sommes heureux d'offrir ces avantages aux anciens prisonniers de guerre. Cette mesure vient répondre à une demande prioritaire du Conseil national des associations d'anciens combattants.

Par suite de l'adoption du projet de loi C-61, les anciens combattants de la marine marchande seront visés par les lois qui s'appliquent aux anciens combattants des forces armées. Nous répondons ainsi à la demande de ces citoyens très spéciaux qui veulent être reconnus, par l'appellation et par la loi, à titre de partenaires égaux de leurs frères et de leurs soeurs des autres armées.

Il y a d'autres modifications dont l'effet est moins profond ou qui touchent moins d'anciens combattants que celles dont je viens de parler. Il n'y a cependant pas de menus changements pour ceux qui sont touchés directement. Le projet de loi comporte des dispositions visant les anciens combattants alliés qui vivent à l'étranger, l'amélioration de l'administration du Tribunal des anciens combattants - la révision et les appels - dont le fonctionnement deviendra plus efficace, la modification de l'administration du programme de funérailles et d'inhumation et le maintien de l'aide accordée à certains survivants de l'explosion de Halifax de 1917.

[Traduction]

(1510)

C'est une triste réalité de la vie que nous ayons envoyé à la guerre nos plus jeunes éléments, qui ont participé à des conflits qu'ils n'avaient pas choisis ou dont ils n'étaient pas responsables. Néanmoins, tout au long du siècle, ils sont partis vaillamment et animés de l'espoir d'une victoire rapide et d'un retour à la vie et à leur pays bien-aimé.

[Français]

Honorables sénateurs, pour un grand nombre d'entre eux, il n'en aura pas été ainsi. Nous devons continuer à commémorer leur sacrifice et à rappeler leur souvenir en maintenant le pacte conclu avec eux il y a longtemps: la promesse de nous occuper de ceux qui ont si vaillamment servi notre pays, de ceux qui ont risqué leur vie pour que les générations suivantes de Canadiens puissent vivre libres et en paix.

Voilà pourquoi j'ai dit dès le départ qu'il n'est que juste que le projet de loi soit adopté rapidement car il maintient notre tradition, qui est de veiller de notre mieux sur nos héros anciens combattants. J'invite donc tous les honorables sénateurs à faire preuve de diligence en examinant le projet de loi C-61. Plus tôt le projet de loi sera adopté, plus tôt les avantages qu'il comporte pourront être offerts aux anciens combattants et à leurs survivants.

C'est le moins que nous puissions faire, et c'est ce que nous devons faire.

[Traduction]

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, je voudrais remercier le sénateur Gill pour sa présentation et le féliciter pour l'excellent travail qu'il a fourni à l'occasion de son premier discours devant cette Chambre. Que voilà un effort louable!

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais souligner que c'est la dernière fois que j'aborde à la Chambre une mesure législative ayant trait aux anciens combattants. C'est donc une étape très importante pour moi.

C'est également, honorables sénateurs, la suite de l'acte de foi que le Parlement du Canada a fait en 1994, quand le gouvernement de l'époque lui a demandé de réviser et de réformer la façon de présenter une demande relative à la pension d'invalidité. Il s'agissait alors d'un processus qui nécessitait un temps considérable. Le nouveau processus a été adopté et le nombre de cas non réglés a presque été éliminé. Je crois que cet acte de foi était justifié. Je dois reconnaître que la nouvelle mesure législative était vraiment la solution à adopter et que nous avons fait de la très belle besogne.

La semaine dernière, à peu près jour pour jour, j'ai parlé du rapport du sous-comité des anciens combattants, qui s'intitulait «Relever la barre». Nous avons exhorté le ministère, dans sa détermination à respecter les délais, à faire preuve de compassion en traitant ces dossiers.

La nouvelle mesure législative est un projet de loi omnibus qui présente un certain nombre de changements. Le premier, c'est la pleine reconnaissance des marins de la marine marchande comme des anciens combattants et l'application ultérieure à leur cas de toutes les lois concernant les anciens combattants.

Un autre changement permet aux conjoints survivants et aux enfants à charge d'obtenir une modification de la pension des anciens combattants après la mort de l'ancien combattant si une majoration aurait dû être faite ou était sur le point d'être faite. Auparavant, la majoration devait atteindre 48 p. 100 pour qu'elle soit faite. Maintenant, elle peut se faire quelle que soit son importance.

Le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) permet à son président de déléguer des personnes qui pourront décider si un appel final devrait être entendu. J'en dirai plus long là-dessus un peu plus tard.

Comme le sénateur Gill l'a mentionné, des modifications proposées permettent aux anciens prisonniers de guerre de recevoir des prestations supplémentaires pour payer leurs frais médicaux.

Une autre modification proposée permettra aux anciens combattants résidant hors du Canada de continuer à percevoir leur pension d'ancien combattant. La période d'application de la loi de 1996 était censée être terminée, mais le gouvernement a permis qu'on la prolonge. J'aurai des questions à ce sujet à l'étape de l'étude en comité.

En vertu de cette mesure législative, le ministre des Anciens combattants a le droit de prendre des règlements en ce qui concerne les pierres tombales, le coût de l'inhumation et la dernière maladie avant la mort. Quand j'ai lu cette disposition, je me suis demandé quel était le lien avec le Fonds du Souvenir. Encore une fois, nous obtiendrons probablement la réponse à cette question en comité.

Si la plupart de ces changements sont positifs, il y a plusieurs points que je voudrais soulever devant le sous-comité - à condition, bien sûr, que le projet de loi soit renvoyé au sous-comité, et je pense qu'il le sera. Je me réjouis, comme la plupart des anciens combattants et le public en général, de voir que les marins de la marine marchande aient été finalement élevés au statut d'anciens combattants de plein droit. Plus de 50 ans après avoir été exposés à des risques égaux, voire supérieurs, à ceux auxquels ont été exposés les membres d'autres armes des forces armées, on leur reconnaît enfin les années de service et le titre.

Les honorables sénateurs sont au courant de la grève de la faim menée par deux membres de la marine marchande qui demandent à être indemnisés pour ne pas s'être vu accorder le droit à des prestations accordées à la fin de la guerre. Ce qui est intéressant, c'est que cette exclusion était pratiquement délibérée car, à cette époque, le gouvernement et le ministre des Transports en place estimaient que les marins de la marine marchande pourraient poursuivre leur métier, que nous serions en mesure de maintenir une marine marchande. Ils ont dit que c'était la raison à l'origine de leur exclusion. Ce plan mal conçu ayant échoué, les marins de la marine marchande demandent depuis à être indemnisés.

Les divers groupes d'anciens combattants ont appuyé cette mesure législative et se sont entendus entre eux pour que les négociations entre le gouvernement et l'association des marins de la marine marchande se poursuivent afin d'arriver à un programme d'indemnisation.

(1520)

J'aimerais faire deux suggestions, honorables sénateurs. La première serait de verser une rente aux marins de la marine marchande survivants. Je ne suis pas actuaire et je ne connais pas bien la façon dont on établit un régime de rente. Toutefois, j'ai appelé plusieurs personnes qualifiées en la matière et j'aimerais faire une suggestion, celle qui est revenue le plus souvent en réponse à ma demande de renseignements. Je suggère donc que le gouvernement prenne 100 millions de dollars et investisse cette somme dans un fonds. Si le taux de rendement du capital investi était de 6 p. 100, cela donnerait 6 millions de dollars par an. Comme il y a environ 3 000 marins survivants, ils auraient une pension de 2 000 $ par an.

Certains trouveront sans doute que 6 millions de dollars, c'est beaucoup, mais je leur ferais remarquer, comme l'a dit le sénateur Gill, que l'âge moyen des anciens combattants de la marine marchande est de 80 ans; leur nombre va donc commencer à décliner rapidement et la facture annuelle ne demeurera pas de 6 millions de dollars pendant très longtemps. Quand on n'aura plus besoin de verser de rentes, les 100 millions de dollars qui auront été mis de côté seront toujours là. Je ne veux pas dire que 2 000 $ par an seraient un montant suffisant. Je n'ai utilisé ces chiffres qu'à titre d'exemple pour essayer d'expliquer l'idée d'une rente.

L'autre mesure que je propose, c'est que tous les anciens combattants de la marine marchande qui sont encore vivants reçoivent une petite pension pour qu'ils soient admissibles au Programme pour l'autonomie des anciens combattants. Comme les honorables sénateurs se le rappellent, dans notre rapport intitulé Relever la barre, nous avons proposé que les 160 000 Canadiens qui ont servi à l'étranger et qui n'ont reçu aucune pension d'invalidité soient admissibles au Programme pour l'autonomie des anciens combattants. Ces deux groupes seraient ainsi sur un pied d'égalité.

Avant de clore la question de l'indemnisation, j'exprime l'espoir que les deux parties pourront engager de bonne foi des négociations sur l'indemnisation qui sera accordée aux marins marchands et qu'elles pourront trouver rapidement une solution satisfaisante au problème.

Les autres modifications, comme les changements prévus pour les pensions de survivant et les dispositions concernant les pensions accordées à des civils, comme les pêcheurs en eau salée de la Seconde Guerre mondiale et les personnes rendues aveugles par l'explosion de Halifax, sont des modifications raisonnables qui ne nécessitent pas beaucoup de commentaires.

Lorsque la modification précédente a été apportée en 1994, j'ai demandé au gouvernement de l'heure de faire en sorte que personne ne reçoive moins d'argent en vertu du nouveau régime qu'il n'en recevait aux termes de l'ancien. Comme ce projet de loi prévoit le transfert de certains paiements de pension de civils dans la caisse des anciens combattants, je formule la même demande, soit que personne ne souffre à cause de ce transfert.

Il y a certains éléments du projet de loi qui me préoccupent et j'aimerais vous en faire part brièvement. Le premier point touche l'exclusion partielle des membres du Ferry Command. Il s'agit en grande partie de civils qui ont piloté des bombardiers du Canada vers l'Europe. Ils sont considérés de la même façon que l'on considérait autrefois les marins de la marine marchande, c'est-à-dire que leurs blessures doivent avoir été causées par une action de l'ennemi ou en réaction à une action de l'ennemi.

Honorables sénateurs, la navigation était plutôt difficile au cours des premières années de la guerre et il était essentiel de maintenir le silence radio. Il arrivait souvent qu'un avion arrive au-dessus de l'Angleterre et qu'il se frappe à un mur de nuage ou de brouillard. Le navigateur disait alors: «Nous sommes au-dessus de l'Angleterre, mais vous devez trouver un endroit pour atterrir.» Ils devaient alors souvent atterrir sur le ventre et je ne crois pas que cela puisse être considéré comme une action de l'ennemi. J'espère qu'ils ne seront pas obligés de se battre pendant 50 ans, comme les anciens combattants de la marine marchande ont dû le faire.

Le projet de loi prévoit également des modifications au chapitre du fonctionnement du Tribunal des anciens combattants (révision et appel). J'ai fait des commentaires à ce sujet la semaine dernière et je ne me répéterai donc pas. Le tribunal demande qu'on apporte trois modifications. La première a trait à la planification de l'audience selon les disponibilités du requérant et du tribunal. Autrefois, on se basait sur les disponibilités du requérant. Il faudra faire preuve de discrétion à ce chapitre.

Il n'y a pas de vice-président au Tribunal des anciens combattants (révision et appel). Aux termes du projet de loi C-61, le président pourra charger un membre du tribunal d'autoriser ou de refuser un appel. Je souligne que, dans son mémoire présenté au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants de la Chambre des communes l'automne dernier, la Légion royale canadienne a fait remarquer qu'au moins 800 à 900 appels avaient été rejetés par suite de décisions du président.

La modification permettra au président de confier ces décisions à un membre du tribunal. Cette situation ne se présentera probablement pas, mais, selon le projet de loi, il est fort possible que désormais, la personne qui assiste au processus de révision dise: «Nous ne procéderons pas à l'étape finale, puisqu'il y a une chance raisonnable que les prestations soient accordées.»

À mon avis, les modifications proposées sont d'ordre bureaucratique. J'entends par là qu'elles avantageront davantage les bureaucrates que les anciens combattants. Face à une telle modification, je suis toujours sur mes gardes et je recommande le plus grand soin dans l'étude de cette proposition.

(1530)

L'article 23 propose de permettre que l'ancien combattant de la marine marchande qui demande une pension puisse déclarer sous serment qu'il a été blessé ou est devenu invalide, à condition qu'il puisse démontrer que son navire se trouvait dans la zone où il affirme qu'il se trouvait. Cette disposition lui donne en fait le bénéfice du doute. Je voudrais toutefois que d'autres anciens combattants aient aussi le droit de faire une déclaration sous serment ayant valeur de preuve. Dans de nombreux cas, il est presque impossible de dire s'ils ont été soufflés par l'explosion d'un obus en Europe de l'Est, s'ils sont tombés d'une jeep en Italie ou s'ils ont contracté une maladie en Extrême-Orient. Je répète que les dossiers médicaux n'étaient pas très précis à l'époque de la Seconde Guerre mondiale et que les médecins militaires étaient trop occupés pour tenir des dossiers détaillés.

Honorables sénateurs, j'espère que le sujet continuera de vous intéresser et que nous aurons le temps d'examiner le projet de loi. Dans sa réponse à une question posée aujourd'hui au sujet des progrès réalisés dans la négociation, le sénateur Graham a dit que le comité serait l'endroit tout indiqué pour soulever la question. Je le prierais de demander au témoin du gouvernement de présenter un rapport actualisé indiquant où en est la négociation.

Sur ce, honorables sénateurs, j'ai hâte que le projet de loi soit déféré au sous-comité; nous pourrons alors recevoir les réponses à nombre de ces questions.

Son Honneur le Président: Si personne d'autre ne désire intervenir, vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je crois que les membres du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie préféreraient que le projet de loi soit déféré à leur excellent et très respecté sous-comité des anciens combattants, que préside le sénateur Phillips. Nous siégerons à 10 heures, mardi prochain, et le premier article à l'ordre du jour sera la présentation d'une motion à ce sujet.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

Projet de loi sur les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement) propose: Que le projet de loi C-55, Loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je voudrais commencer par faire un rappel historique. Le premier périodique publié au Canada l'a été, je suis fier de le dire, en Nouvelle-Écosse. Il s'appelait le Nova Scotia Magazine. J'ai une copie du volume 3 de cette publication qui remonte à 1790. Les membres de mon personnel et celui de la Bibliothèque du Parlement ont réussi à produire une copie de ce périodique, dont le titre au long était Nova Scotia Magazine and Comprehensive Review of Literature, Politics and News. Il s'agissait d'un recueil des articles les plus intéressants qui étaient parus dans les périodiques de Grande-Bretagne, d'Irlande et d'Amérique, auxquels s'ajoutaient divers écrits en vers et en prose jamais publiés auparavant. Il s'agit du volume 3 pour les mois de juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 1790. Il a été imprimé par John Howe, le père du grand et célèbre Joseph Howe. L'imprimerie de John Howe était située au coin des rues Barrington et Sackville, à Halifax.

Honorables sénateurs, ce magazine était lu par quelque 200 abonnés. Malheureusement, il a été forcé de disparaître après trois ans seulement. Il a cessé de paraître à cause des coûts de publication élevés, du faible taux national de lecteurs et du pouvoir de commercialisation de publications mieux établies et importées de l'étranger.

Comme vous pouvez le constater, honorables sénateurs, les difficultés auxquelles est aux prises aujourd'hui l'industrie des périodiques au Canada ne sont pas nouvelles, mais l'importance de cette industrie pour le Canada est aussi grande aujourd'hui - sinon plus grande que jamais auparavant. En effet, depuis plusieurs décennies, les gouvernements canadiens de diverses allégeances politiques se sont efforcés d'établir des politiques visant à aider notre industrie des périodiques à prospérer. Les membres de notre Chambre se sont particulièrement attachés à relever le défi de tâcher d'assurer le maintien d'une industrie vitale des périodiques au Canada.

Honorables sénateurs, je voudrais citer un passage d'un rapport d'un comité sénatorial qui exprime bien la valeur de cette industrie pour les Canadiens:

Les magazines constituent un phénomène assez particulier. Ce sont eux qui donnent au Canada la seule presse nationale qu'il possède. Ils confèrent au produit journalistique des dimensions que les autres moyens de diffusion ne peuvent offrir, comme la profondeur et l'étendue du traitement, en plus de la séduction du graphisme. Parce qu'ils échappent au souci des tombées quotidiennes, ils peuvent aspirer à un niveau de qualité auquel les autres moyens de diffusion peuvent rarement prétendre. Sur le plan de la survivance culturelle, ils pourraient éventuellement se révéler tout aussi importants que le chemins de fer, les lignes aériennes, les réseaux de radiodiffusion ou les ligues nationales de hockey; il leur est possible de soutenir, bien que d'une façon différente de celle des autres genres d'organes d'information, le sentiment d'identité dans l'esprit des Canadiens. Mais les magazines canadiens ont des difficultés. Il serait excessif de dire que cette industrie en est à son dernier souffle, mais il le serait tout autant d'affirmer qu'elle est en état de croissance. Il n'existe guère de magazines de propriété canadienne, exploitant le marché de la consommation, qui puissent parler de survivre avec le plus petit degré de certitude. Un certain nombre de magazines depuis longtemps établis affrontent tout simplement la disparition, et il semble de moins en moins probable qu'on en lance de nouveaux pour les remplacer.

Honorables sénateurs, c'est ce qu'écrivait dans son rapport de décembre 1970, il y a près de 30 ans, le comité spécial du Sénat sur les moyens de communication de masse, présidé par notre ancien collègue, l'honorable Keith Davey.

(1540)

Dix ans plus tôt, en 1961, la Commission royale d'enquête sur les publications, présidée par un autre de nos anciens collègues, le sénateur Gratton O'Leary, définissait les communications, dont les périodiques, dans les termes suivants:

[...] le fil qui lie les fibres de notre pays. Elles peuvent protéger les valeurs d'un pays et en encourager la mise en pratique; rendre possible le gouvernement démocratique et probable l'amélioration du gouvernement; adoucir les aspérités sectaires et permettre des solutions de compromis honorables; informer et éclairer les arts, les sciences et le commerce; aider à commercialiser les produits d'un pays et à promouvoir son bien-être matériel. On peut donc affirmer, sans conteste, que les communications d'un pays lui sont tout aussi indispensables que ses défenses et qu'elles méritent à tout le moins le même niveau de protection.

Honorables sénateurs, les périodiques satisfont aujourd'hui nos attentes. Ils invitent les Canadiens à réfléchir de façon critique à ce que nous sommes et à l'avenir que nous voulons pour notre pays. Les périodiques font place aux grands récits comme aux petits.

La revue Canadian Living, qui a un tirage de 500 000 exemplaires, traite du nouveau territoire, le Nunavut, dans un de ses numéros. On trouve dans ce même numéro un article qui propose une traversée du Canada en chemin de fer et raconte aux Canadiens, aussi bien ceux de la Nouvelle-Écosse que du Nouveau-Brunswick ou du Québec, comment Mary Krupa, de Kelowna, en Colombie-Britannique, a mobilisé des centaines de bénévoles l'été dernier pour faciliter le retour des faucons pèlerins dans la vallée de l'Okanagan, en Colombie-Britannique.

Les périodiques canadiens permettent à nos écrivains et éditeurs de pratiquer leur art et de se perfectionner. Certains de nos écrivains les plus distingués ont poli leur art dans les périodiques canadiens. Les écrivains et éditeurs canadiens sont parmi les plus réputés au monde.

Honorables sénateurs, nous avons aujourd'hui au Canada une industrie des périodiques dynamique, quoique fragile. En 1956, quelque 661 périodiques étaient publiés au Canada. Moins de 25 p. 100 de tous les périodiques distribués au Canada à cette époque étaient canadiens. Aujourd'hui, plus de 1 000 éditeurs produisent plus de 1 500 périodiques canadiens. Plus de 65 p. 100 de tous les périodiques diffusés au Canada sont canadiens.

Malheureusement, le fait d'avoir des lecteurs satisfaits n'est pas un gage de succès dans l'industrie du magazine. La survie de ce secteur repose sur la vente de services publicitaires, pas sur celle de magazines. Les éditeurs canadiens tirent des revenus publicitaires de 65 à 100 p. 100 de leurs revenus. Ce sont les revenus publicitaires, la moelle épinière de l'industrie canadienne du magazine, qui sont actuellement menacés. Le projet de loi C-55 permettrait de contrer cette menace.

Permettez-moi d'insister sur le fait que le Canada a le marché culturel le plus ouvert au monde. Le projet de loi dont nous sommes saisis ne changerait rien à cela. Plus de 80 p. 100 des magazines en vente dans nos kiosques à journaux viennent de l'étranger, et 95 p. 100 d'entre eux sont des magazines américains. La vente de magazines américains au Canada représente la plus forte exportation mondiale de magazines vers un seul pays. Aucune disposition du projet de loi C-55 ne tente de mettre un terme à cela. Le Canada restera ouvert aux magazines en provenance de l'étranger, y compris à ceux qui viennent de nos voisins du sud. La libre circulation des idées entre les États est importante et constitue un enrichissement. Cela devrait rester et restera inchangé.

Notre industrie du magazine est toutefois menacée par des éditeurs étrangers qui voudraient vendre à rabais à des annonceurs canadiens des services publicitaires destinés au marché canadien. Permettez-moi d'expliciter cela.

Sur le marché canadien, la vente d'une page de publicité couvre généralement le coût de production d'une page de contenu original canadien. Comme chacun le sait, le bassin d'annonceurs canadiens qui achètent des services publicitaires des éditeurs de magazines est limité. Les éditeurs américains bénéficient d'économies d'échelle qui sont incroyables et sur lesquelles ne peuvent compter les éditeurs canadiens. Parce que les Américains ont des tirages tellement plus élevés que les nôtres, leurs coûts de production unitaires sont inférieurs.

Lorsqu'ils prennent un magazine dont les coûts de production sont déjà couverts par leurs revenus publicitaires aux États-Unis et qu'ils publient essentiellement le même magazine destiné au marché canadien, ils peuvent offrir aux annonceurs canadiens des services publicitaires à rabais. Même s'ils ajoutent un infime pourcentage de contenu canadien, les recettes publicitaires nécessaires pour payer ce contenu ne sont tout simplement pas comparables à celles dont a besoin un magazine canadien pour payer tout le contenu canadien original, y compris le salaire des éditeurs, des journalistes, des photographes et une foule d'autres choses.

Honorables sénateurs, l'industrie du magazine au Canada n'est pas très rentable. En effet, près de la moitié des magazines canadiens ne font pas de bénéfices. En 1997, 90 nouveaux magazines ont vu le jour au Canada, alors que 31 ont déposé leur bilan. Au mieux, c'est un secteur très difficile. Il n'est tout simplement pas réaliste de s'attendre à ce que les éditeurs canadiens puissent soutenir la concurrence des éditeurs américains pour les services de publicité canadiens quand on sait que les éditeurs américains n'ont pas les mêmes coûts.

Si nous voulons garantir la viabilité continue de notre industrie du magazine, nous devons garantir l'accès continu aux revenus provenant de la vente de services de publicité. C'est exactement ce que ferait le projet de loi C-55. Le projet de loi C-55 interdirait aux éditeurs étrangers de fournir des services de publicité visant le marché canadien à des annonceurs canadiens. Il n'interdirait pas la vente de services de publicité visant d'autres marchés.

Par exemple, rien n'empêcherait un annonceur canadien de faire paraître une annonce dans une publication étrangère visant les États-Unis, le marché nord-américain ou les marchés mondiaux. Toutefois, le projet de loi veillerait à ce que les éditeurs canadiens continuent de faire affaire avec des annonceurs canadiens pour des services de publicité visant le marché canadien.

La loi serait appliquée de plusieurs façons. D'abord, si le ministre est mis au courant d'une infraction présumée à la loi ou de l'imminence d'une telle infraction, il peut adresser une lettre à l'éditeur étranger lui demandant de ne pas enfreindre la loi, à défaut de quoi la transaction sera annulée. Il pourrait ensuite intenter des poursuites au civil à l'éditeur étranger, lui enjoignant de ne pas contrevenir à la loi.

Si cela ne suffit pas, la loi prévoit également des sanctions pénales. Les peines qui peuvent être infligées sont de 20 000 $ pour quiconque est jugé coupable par procédure sommaire pour une première infraction et de 250 000 $ pour une société reconnue coupable par mise en accusation. Au moment de la condamnation, le tribunal peut imposer une amende égale au montant de tout gain pécuniaire découlant de l'infraction. Cette amende s'ajouterait à toutes les autres pénalités.

(1550)

Le projet de loi contient également des dispositions accordant un pouvoir d'enquête pour éviter que les éditeurs essaient de se soustraire à leurs obligations en commettant des actes interdits à l'extérieur du Canada. Les dispositions sur les définitions et les obligations ont été rédigées avec soin afin d'éviter la possibilité de recourir à des tiers pour contourner les interdictions contenues dans le projet de loi.

Je précise que plusieurs publications étrangères ont depuis des années des éditions canadiennes. Le gouvernement n'a pas l'intention de changer tout à coup les règles pour ces magazines qui sont vendus depuis longtemps au Canada. Le projet de loi leur accorde une protection. En fait, l'étendue de cette protection a soulevé certaines questions étant donné le texte initial du projet de loi. Le comité de l'autre endroit a adopté un amendement qui précise que les éditeurs étrangers pourront continuer de vendre les publications qu'ils destinent déjà au marché canadien et même en accroître le tirage.

Honorables sénateurs, je voudrais aborder brièvement certaines questions relatives au commerce international soulevées au sujet du projet de loi. Comme le savent les honorables sénateurs, en octobre 1997, l'OMC a rendu une décision déclarant que les droits de douanes et les taxes d'accise visant les périodiques faisant l'objet de tirages dédoublés étaient contraires à l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce. Le groupe de l'OMC a clairement déclaré qu'il ne contestait pas du tout les objectifs de protection de l'identité culturelle canadienne visés par le gouvernement du Canada. Le problème provenait du moyen choisi pour protéger cette identité.

Le gouvernement du Canada s'est conformé à la décision de l'OMC. Il a aboli les dispositions de la Loi sur la taxe d'accise et du Tarif des douanes sur les tirages dédoublés. Il a restructuré les subventions postales et a harmonisé les subventions postales pour les envois nationaux et internationaux.

Le projet de loi C-55 est totalement différent de la mesure législative étudiée par l'OMC. Le projet de loi porte sur les services de publicité visés par l'Accord général sur le commerce des services et pas l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce. Les dispositions du projet de loi C-55 sont tout à fait conformes aux obligations imposées au Canada par l'Accord général sur le commerce des services. Évidemment, elles sont aussi conformes aux obligations imposées par l'ALENA.

Honorables sénateurs, l'industrie canadienne des périodiques est un élément essentiel du tissu social de notre pays. Le projet de loi C-55 établit un cadre juste et efficace qui verra à ce que les éditeurs canadiens continuent d'avoir accès aux recettes publicitaires nécessaires à leur survie. Il garantira que seuls les éditeurs canadiens pourront vendre des services publicitaires destinés au marché canadien, sauf dans le cas des publications protégées par la clause des droits acquis. Elle prévoit des peines sévères contre les éditeurs étrangers qui enfreindront la loi.

Je suis heureux d'ajouter que ce projet de loi a reçu l'appui de tous les partis politiques à l'autre endroit, sauf un.

Par exemple, M. Scott Brison, qui est député de Kings-Hants à l'autre endroit, a souligné l'importance de cette mesure législative et a ajouté qu'elle montrerait clairement notre détermination à protéger notre souveraineté culturelle devant les pressions mondiales sans cesse croissantes.

Les députés du Nouveau Parti démocratique et du Bloc québécois ont également exprimé leur appui à l'égard du projet de loi. Le Parti réformiste est le seul à s'y être opposé.

Honorables sénateurs, je crois que le projet de loi C-55 est une réponse équilibrée et efficace à un besoin urgent d'une industrie canadienne vitale, et j'espère que vous vous joindrez à moi pour l'appuyer.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, je veux demander au sénateur Graham s'il est convaincu que l'objectif du maintien de notre identité culturelle sera accepté par l'OMC comme un motif valable pour justifier la distinction établie dans ce projet de loi.

Le sénateur Graham: Oui, absolument.

L'honorable Lowell Murray: La question du sénateur Stewart appelle une question complémentaire. J'ai cru comprendre que le Canada avait offert de soumettre ce projet de loi à l'OMC pour qu'elle se prononce à ce sujet, mais que les États-Unis avaient refusé. Cette offre est-elle toujours valable?

Le sénateur Graham: Comme mon collègue le sait, des négociations sont en cours entre le Canada et les États-Unis, et le gouvernement n'a pas l'intention d'interrompre l'étude de ce projet de loi. Si le gouvernement des États-Unis décidait de faire examiner cette mesure par l'OMC, ce serait au gouvernement du Canada de décider ce qu'il veut faire à ce moment-là. Toutefois, pour l'instant, le gouvernement a l'intention de poursuivre l'étude de ce projet de loi sous sa forme actuelle.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, avant de fournir cette réponse, le leader du gouvernement s'était toujours refusé, tout comme le gouvernement, à commenter les négociations qui semblent se poursuivre entre le Canada et les États-Unis. Je félicite mon collègue, qui vient de prononcer un discours très convaincant et exhaustif, dans lequel il a omis toutefois de mentionner un élément crucial, puisque ces négociations pourraient, en tout temps, rendre ce projet de loi caduc.

Que peut nous dire le ministre au sujet de ces négociations?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, au moment où je vous parle, les négociations sont interrompues. Je sais que, la semaine dernière, les négociations se poursuivaient à un très haut niveau. Je ne sais pas si les négociations ont repris, mais je serais heureux de m'informer et de faire rapport au Sénat. De toute façon, nous aurons certainement des nouvelles de première main lorsque le projet de loi sera renvoyé au comité.

Le sénateur Murray: L'honorable sénateur est-il en train de nous dire qu'il n'y a pas, à sa connaissance, d'autres réunions qui sont prévues?

Le sénateur Graham: Il n'y en a pas, à ma connaissance.

Le sénateur Murray: Qui est responsable de ces négociations? J'ai conclu, d'après les reportages des médias, que la délégation est dirigée par les sous-ministres du Patrimoine canadien et du Commerce international.

Le sénateur Graham: C'est exact, je crois.

Le sénateur Murray: Qui est le responsable?

Le sénateur Graham: C'est la ministre du Patrimoine canadien qui est responsable du projet de loi. De toute évidence, la mesure législative a certaines répercussions sur le ministère du Commerce. Comme le signalait le sénateur Murray, les deux sous-ministres ont participé aux négociations avec leurs homologues des États-Unis.

(1600)

Le sénateur Murray: Qui a confié le mandat à ces négociateurs?

Le sénateur Graham: Il est assez évident qu'ils suivent les directives des deux ministres.

Le sénateur Murray: Le ministre peut-il préciser quelles sont les questions abordées dans le cadre de ces négociations?

Le sénateur Graham: Il ne fait pas de doute qu'il est question des préoccupations des États-Unis, qui redoutent que les périodiques américains soient traités de façon inéquitable. Ce n'est pas le cas, je crois, comme je l'ai dit dans mes commentaires. Les périodiques qui faisaient déjà des affaires et qui vendaient de la publicité au Canada avant la présentation du projet de loi à l'autre endroit seront libres de poursuivre leurs activités.

Je tiens à souligner que le Canada a respecté les règles du jeu. En août dernier, le Canada a respecté intégralement tous les aspects de la décision rendue par l'Organisation mondiale du commerce au sujet des périodiques. Nous avons dû adopter des mesures afin d'abroger le code tarifaire et de modifier la Loi sur la taxe d'accise. Nous avons modifié l'application des subventions des tarifs postaux et nous avons réduit les tarifs postaux des périodiques étrangers.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire concernant le dernier échange. J'ai écouté attentivement le discours du ministre et j'ai pris note de son vigoureux appui au projet de loi et de son affirmation selon laquelle il respecte désormais la décision de l'OMC.

Dois-je comprendre que le gouvernement est satisfait du projet de loi dans sa forme actuelle et qu'il ne présentera pas d'amendements à l'étape de l'étude en comité ou de la troisième lecture?

Le sénateur Graham: C'est bien cela au moment où je vous parle.

Le sénateur Lynch-Staunton: Au moment où nous nous parlons et au moment où nous nous parlerons la semaine prochaine, j'espère que nous parlerons de la même chose. Si le gouvernement a l'intention d'apporter des amendements qui modifieront toute l'allure du projet de loi, il ne serait pas très profitable de tenir quelque débat que ce soit d'ici là.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, à ma connaissance, aucun amendement n'est envisagé à l'heure actuelle.

Le sénateur Lynch-Staunton: J'aurais dû penser qu'un projet de loi du gouvernement présenté en deuxième lecture ne laisserait pas présager d'amendement de la part de celui-ci. Sinon, pourquoi serait-il ici? Y a-t-il déjà eu un projet de loi du gouvernement transmis au Sénat par l'autre endroit où le ministre responsable ne peut nous dire si des amendements sont prévus ou non?

Le sénateur Graham: Je viens de dire que nous n'avons aucun amendement prévu et que nous n'avons pas l'intention d'apporter des amendements.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, la ministre parrainant le projet de loi à l'autre endroit nous a dit de nous attendre à des amendements au Sénat. Malheureusement, le ministre parrainant le projet de loi ici ne peut ou ne veut le confirmer.

Le sénateur Graham: Je ne peux le confirmer, car aucune décision de cette nature n'a été prise.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, à l'étape de la deuxième lecture, nous discutons du principe du projet de loi. Nous venons d'entendre qu'il y a des discussions en cours sur la question avec nos amis américains. Quel principe du projet de loi est non négociable et quel principe fait partie des négociations en cours?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, la négociation dont j'ai parlé a eu lieu la semaine dernière et au cours des semaines précédentes. À ma connaissance, il n'y a pas de négociations en cours à l'heure actuelle.

[Français]

L'honorable Roch Bolduc: Est-ce que je comprends que le gouvernement a fait son nid? Peu importe les pressions de l'industrie de l'acier, du textile ou autre, a-t-on pris la décision de procéder avec le projet de loi? Est-ce la décision du gouvernement?

[Traduction]

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, j'ai dit que quelles que soient les pressions qui sont faites, le gouvernement ne cédera pas. L'opposition n'écoute-t-elle pas?

Le sénateur Lynch-Staunton: Le gouvernement ne pliera pas?

Le sénateur Graham: Je suis le parrain du projet de loi et, en ce qui me concerne, le projet de loi restera tel qu'il est. Mes honorables collègues d'en face peuvent en tout temps, au comité ou en troisième lecture, proposer des amendements. C'est leur prérogative.

[Français]

Le sénateur Bolduc: On ne parle pas de nos amendements, on parle des vôtres, voilà la différence. Indépendamment de ce que l'on pourrait appeler le chantage des États-Unis au sujet de l'acier et d'autres industries, le gouvernement a-t-il décidé qu'il passait outre et qu'il procédait avec ce projet de loi?

[Traduction]

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, la ministre du Patrimoine canadien a participé à l'émission As It Happens, hier soir. Elle a dit croire qu'il faudrait quatre à six semaines au Sénat pour adopter le projet de loi. Elle a dit que les négociations continueraient même si elles sont interrompues à l'heure actuelle. Si les États-Unis et le Canada négocient, c'est pour essayer d'en venir à un compromis ou à une entente, et s'il y a entente, le projet de loi sera modifié en conséquence.

Le sénateur Graham: Cela pourrait être merveilleux.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, je ne sais pas si ce serait si merveilleux que cela. Allons-nous encore céder devant les Américains? Si c'est cela que vous trouvez merveilleux, alors vous avez probablement raison. Pourquoi négocier si nous sommes satisfaits du projet de loi? Qu'y a-t-il à négocier?

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: C'est bien ici la Chambre de réflexion.

Le sénateur Lynch-Staunton: Donnez-nous matière à réflexion.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, ma question au ministre qui présente le projet de loi est celle-ci: est-il en train de nous dire qu'aucun des principes de ce projet de loi n'est négociable ou que certains pourraient l'être?

Le sénateur Graham: Écoutez bien, honorables sénateurs. Les principes énoncés dans ce projet de loi visent à protéger la culture canadienne et à donner aux auteurs et aux rédacteurs en chef des périodiques canadiens une chance de faire leur travail et de nous dire encore ce qu'être Canadien veut dire. Tels sont les principes derrière le projet de loi.

Le Canada respecte entièrement ses obligations commerciales. Les hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international l'ont fait valoir très clairement auprès de leurs homologues américains. Nous croyons fermement que ce projet de loi comporte tous les outils nécessaires et, en fait, les compromis qui s'imposaient, selon nous, après la présentation du projet de loi précédent. Nous ne voyons aucune raison pour que nos amis américains n'aiment pas ce projet de loi.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, je répète au ministre que nous, de ce côté-ci, sommes les plus ardents défenseurs de la culture canadienne. En fait, c'est pour cela que nous nous sommes efforcés d'écarter ce dossier des accords de libre-échange lorsque nous formions le gouvernement. Notre position ne fait aucun doute.

Nous essayons de comprendre la position du gouvernement. Vous vous présentez au Sénat avec un projet de loi, et vous nous dites qu'on est en train de négocier quelque chose. Je voudrais savoir si le principe de votre projet de loi est non négociable.

Le sénateur Graham: Le principe du projet de loi ne fait pas l'objet de négociations avec nos amis américains.

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, imaginons un peu que le projet de loi soit adopté. Je suppose qu'il entrerait en vigueur quatre à six semaines plus tard. De nombreuses versions de ce projet de loi ont été présentées.

Dans quelle mesure nos amis américains pourraient-ils exercer des représailles commerciales si l'envie leur en prenait?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne vois pas du tout pourquoi les États-Unis voudraient exercer des représailles. Comme je l'ai dit plus tôt, le Canada agit d'une façon qui est parfaitement conforme à ses obligations commerciales internationales. Il a respecté les règles du jeu. Si les États-Unis, en dernière analyse, n'aiment pas les dispositions du projet de loi, ils pourront toujours avoir recours à la procédure de règlement des différends internationaux. C'est comme cela qu'on règle ce genre de désaccord, et non en exerçant des représailles.

(1610)

Le sénateur Spivak: Des représentants commerciaux du plus haut niveau ont déclaré qu'il y aurait des représailles.

Je conviens que ce que vous dites correspond à la façon dont les choses devraient logiquement se passer. Mais ces représentants ont dit que ce n'est pas ainsi qu'elles se passeraient. Par ailleurs, divers représentants de l'industrie de l'édition nous ont dit que Time Warner ne se contentera pas de 98 p. 100 du marché et veut le contrôler à 100 p. 100. Time Warner pèse de tout son poids.

Ce que je vous demande, c'est si des représailles seraient justifiées. Quelle portée pourraient-elles avoir, aux termes des lois commerciales? Les journaux parlent de milliards de dollars, mais je crois que ce n'est pas exact. Le ministre pourrait-il nous donner une idée du genre de mesures de représailles que les Américains pourraient prendre?

Le sénateur Graham: La question est hypothétique; je ne peux pas prévoir le genre de représailles que les Américains pourraient exercer.

Il est important pour nous de comprendre, en tant que Canadiens et sénateurs, que nous devons défendre les intérêts de notre pays. Nous ne pouvons pas toujours nous en laisser imposer. Cela suffit! Poursuivons nos travaux et appuyons cette mesure législative.

L'honorable John B. Stewart: Si vous me permettez de poser une question, les membres de l'opposition semblent vouloir qu'on leur garantisse que le gouvernement n'apportera pas d'amendements au comité. C'est certes une garantie que personne ne peut donner.

Comme le sénateur Kinsella l'a déclaré, le projet de loi C-55 a un principe. Ainsi, un sénateur indépendant membre de ce comité pourrait fort bien présenter un amendement allant dans le sens du principe du projet de loi. À ce stade-ci de l'étude du projet de loi, il semble déraisonnable de demander à quiconque des sénateurs de s'engager à ne pas présenter d'amendement. C'est mon premier point.

En ce qui concerne le comportement des Américains, dans sa question, le sénateur Spivak a laissé entendre que si le Parlement adopte la mesure législative proposée, si celle-ci est contestée devant l'Organisation mondiale du commerce et si l'organisation donne raison au Canada, tout à coup, les Américains vont faire fi de la loi. N'est-ce pas là une grave supposition?

Je dis «grave» car si la présomption est valable, alors tout engagement américain à l'égard du GATT à l'époque ou de l'Organisation mondiale du commerce maintenant ne voudrait rien dire. Pouvons-nous fonctionner dans un marché mondial des produits et services si cette présomption est valable?

Le sénateur Graham: Si on me posait cette question, je répondrais non.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, on ne peut poser une question qu'au sénateur qui a prononcé le discours. En fait, la question doit être adressée au leader du gouvernement.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je voudrais poser au leader du gouvernement une question qui découle de la teneur de sa dernière réponse.

Le ministre nous a exhortés avec beaucoup d'éloquence à aller de l'avant avec ce projet de loi. Je voudrais connaître les espoirs et les attentes du gouvernement relativement à ce projet de loi. On suppose qu'il sera renvoyé au comité la semaine prochaine. Le gouvernement s'attend-il à ce qu'il soit adopté et à ce qu'il reçoive la sanction royale avant les vacances de Pâques?

Le sénateur Graham: Je m'attends à ce que le projet de loi suive la voie normale. Je crois comprendre que le chef de l'opposition voudrait peut-être répondre la semaine prochaine. Il vient de dire qu'il est tout à fait prêt et il pourrait peut-être parler dès maintenant de cette mesure. D'autres honorables sénateurs peuvent vouloir donner leur point de vue sur le projet de loi. Ensuite, il sera renvoyé au comité compétent.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, j'aimerais avoir des éclaircissements. Le leader du gouvernement nous a dit avec une grande éloquence qu'il fallait défendre le Canada, résister à l'intimidation de nos horribles voisins du sud et donner suite au projet de loi, dans lequel nous croyons, qui répond à toutes les exigences des ententes internationales, et ainsi de suite.

Le sénateur Murray a demandé si le projet de loi serait adopté avant Pâques. On lui a répondu qu'il n'y avait pas urgence. Pourquoi n'y a-t-il pas urgence? Des négociations sont actuellement en cours ou pourraient reprendre. Sur quoi portent-elles? Qu'est-ce que le Canada et les États-Unis négocient actuellement, qui pourrait avoir une influence sur le projet de loi? Ces négociations se déroulent à huis clos. Autrement dit, le Parlement, auquel il incombe d'adopter des lois, attend l'issue des négociations à huis clos qui se tiennent à Washington avant de décider du contenu du projet de loi. C'est la première fois, du moins depuis que je siège au Sénat, qu'on nous envoie un projet de loi avec la consigne non écrite que des négociations avec un autre pays en détermineront le contenu final.

Honorables sénateurs, en quoi l'issue des négociations peut-elle influer sur le contenu du projet de loi?

Le sénateur Graham: Des négociations, conversations et discussions se déroulent en permanence entre les deux alliés les plus proches du monde.

Ce ne sera pas la première fois que les sénateurs des deux côtés auront éclairé le gouvernement par un examen attentif et réfléchi d'un projet de loi et y auront apporté des amendements.

Je n'ai pas l'intention, en tant que parrain du projet de loi ni en tant que leader du gouvernement au Sénat, de proposer des amendements et, à ma connaissance, le gouvernement n'a pas non plus l'intention de le faire.

Je dis simplement que nous devons procéder selon les règles au Sénat et que c'est ce que nous avons l'intention de faire. Le chef de l'opposition et tous les autres honorables sénateurs qui veulent prendre la parole au sujet de cet important projet de loi peuvent le faire, à moins que l'honorable sénateur Lynch-Staunton ne veuille accélérer le processus d'adoption du projet de loi et le renvoyer au comité la semaine prochaine. Je peux assurer aux honorables sénateurs que nous sommes tout disposés à coopérer en ce sens.

(Sur la motion du sénateur Lynch-Staunton, le débat est ajourné.)

(1620)

Le budget de 1999

L'exposé du ministre des Finances-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, attirant l'attention du Sénat sur le budget présenté par le ministre des Finances à la Chambre des communes le 16 février 1999.-(L'honorable sénateur Tkachuk).

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, je tiens tout d'abord à vous remercier de m'avoir permis d'étaler mon intervention sur deux jours.

Hier, j'ai mis fin à mes observations en parlant des cotisations à l'assurance-emploi. J'ai dit que le ministre des Finances avait supprimé la surtaxe fédérale de 3 p. 100, ce qui coûte quelque 1,5 milliard de dollars. Cette surtaxe ne s'appliquait pas à tous les contribuables; elle frappait un groupe spécial, en fonction de leur revenu.

Le ministre des Finances a dit qu'il se servirait de l'excédent du compte de l'assurance-emploi pour accorder des avantages fiscaux à d'autres Canadiens. Il a supprimé la surtaxe fédérale de 3 p. 100 et, en même temps, exigé des travailleurs et des entreprises près de 5 milliards de dollars par an en cotisations à l'assurance-emploi. Cela équivaut en fait à une surtaxe imposée aux travailleurs et aux sociétés. Ces cotisations concernent un groupe spécial. Tous ne paient pas l'assurance-emploi. Les agriculteurs et les travailleurs autonomes ne versent pas de cotisations. Pourtant, tous, sauf les gens qui travaillent, ont eu droit à la réduction de 3 p. 100 de la surtaxe fédrale.

Cet impôt progressif traite les Canadiens différemment les uns des autres. Ceux qui cotisent à l'assurance-emploi sont également traités différemment. Les résultats de ce type de traitement fiscal seront catastrophiques.

Dans notre village planétaire, la technologie a non seulement accéléré l'acheminement de l'information, mais aussi donné plus de liberté dans le choix de l'endroit où l'on habite et travaille. De nos jours, l'endroit où l'on travaille et d'où l'on expédie ses produits importe moins. Cela veut dire que les entreprises iront là où c'est le plus avantageux au plan économique. Ce n'est pas très bon pour le Canada. Les plus instruits seront les premiers à partir, laissant derrière ceux qui ont plus de mal à se débrouiller, sans les avantages que rapportent les entrepreneurs, les créateurs et ceux qui, au plan technique, se préparent pour le prochain siècle.

On en parle depuis nombre d'années. Dans un article de la revue Maclean's que j'ai cité tout à l'heure, il est dit que l'OCDE a prévenu que les impôts élevés que l'on connaît au Canada pourraient inciter des entreprises et des travailleurs spécialisés à s'installer au sud de notre frontière. Ottawa est bien au fait du risque potentiel, selon l'OCDE.

Statistique Canada a dit à Maclean's que le nombre de personnes qui quittent le pays se situe entre 12 000 et 20 000 par an, et parmi eux se trouvent des ingénieurs et des spécialistes des technologies de pointe. C'est sans compter les 9 770 travailleurs qui ont émigré en 1996 en signifiant leur intention de ne jamais revenir. En contrepartie, nous avons accueilli 3 500 citoyens américains sur une population de 300 millions d'habitants. Microsoft propose un emploi à tous les diplômés en informatique de l'Université de Waterloo, et 80 p. 100 d'entre eux nous quittent chaque année.

M. Desmarais, un homme d'affaires québécois et ami intime du premier ministre du Canada, c'est bien connu, a dit récemment que:

Les Canadiens intelligents et ambitieux n'ont pas d'autre choix que d'immigrer aux États-Unis parce que les impôts sont exorbitants au Canada.

Il a demandé: «Peut-on les blâmer?»

Il a parlé d'un exode des cerveaux, et aussi d'un exode de revenus potentiels pour le Canada. Selon lui, lorsque le gouvernement est trop cupide, les gens trouvent d'autres solutions.

Dans un article publié le 16 mars dans le National Post, on rapportait que Jim Pattison, un homme d'affaires de Vancouver, aurait dit que les impôts élevés faisaient fuir les éléments les meilleurs et les plus brillants aux États-Unis:

C'est un gros problème qui va en s'aggravant. De tels taux d'imposition nous empêchent d'être compétitifs. [...]

Les bons éléments quittent le pays. Nous sommes en train de faire fuir les gens qui prennent les décisions en matière d'investissement, les gens qui créent des emplois.

M. Bryden, président des Sénateurs d'Ottawa, a fait beaucoup de lobbying pour faire valoir que la faiblesse du dollar canadien tue les sports professionnels comme le hockey au Canada. Les impôts. Il a parlé des impôts fonciers. En 1998, on a évalué l'impôt qu'il devait payer à 4,5 millions de dollars. Il a fait appel. Hier, il a reçu une réponse du gouvernement qui veut faire passer cette somme à 7,2 millions de dollars. Il a fait remarquer que la taxe de vente au détail et la taxe sur les spectacles coûtaient à son équipe 5,6 millions de dollars, et que la TPS lui coûtait 5 millions de dollars. La surtaxe routière prélevée auprès de son équipe est de 2,1 millions de dollars. L'impôt sur les grandes sociétés et l'impôt sur le capital lui coûtent 1,1 million de dollars. La retenue d'impôt des non-résidents prélevée auprès de l'équipe se chiffre à 450 000 dollars.

La majorité des autres équipes de la Ligue nationale de hockey ne paient pas de taxe de vente, ou très peu. Toutes les équipes américaines combinées ont payé l'an dernier 2,2 millions en impôts sur le capital et impôts fonciers, ce qui veut dire que toutes ces équipes combinées paient nettement moins d'impôts qu'il n'en a payés sur son propre stade. Il n'est pas étonnant que les entreprises aillent s'installer ailleurs.

Plus tôt cet après-midi, nous avons parlé de la culture, des écrivains et de ce que nous ferons pour protéger les périodiques canadiens. Pourtant, nous perdons des entraîneurs, des artistes et des athlètes qui vont s'installer aux États-Unis ou en Grande-Bretagne. Dans les années 70, les gens voulaient partir de Grande-Bretagne. Maintenant, les gens veulent y aller parce que les impôts y sont moins élevés qu'au Canada.

Tandis que nous jonglons avec des subventions et des allégements fiscaux inefficaces, nous perdons ces gens qui émigrent aux États-Unis. Nous perdons aussi ce qu'ils peuvent nous offrir de plus important - leur argent et leur présence. Quand Shania Twain déménagera aux États-Unis, nous perdrons une artiste qui remplit le centre Corel deux soirs d'affilée.

Je ne blâme pas ces gens de quitter le Canada. Ils le font parce que rester ici leur coûterait des millions de dollars de plus. Ce n'est pas qu'ils ne veuillent pas vivre ici. Avec les conditions que nous avons aujourd'hui, c'est tout aussi facile de faire des affaires à partir du Canada qu'à partir des États-Unis. Tous nos acteurs, réalisateurs et producteurs les plus talentueux, ceux qui peuvent frayer avec les plus grands, vont vivre aux États-Unis pour les mêmes raisons.

Pendant ce temps, on argumente à propos d'une surtaxe de 3 p. 100 et de petits allégements fiscaux minimaux. Les temps sont durs pour les gens. Nos épargnes diminuent. Il n'y a pas d'argent de trop.

(1630)

Un salaire annuel de 60 000 $ est considéré comme élevé et il est imposé à un taux de 50 p. 100. Aux États-Unis, un salaire n'est considéré élevé que lorsqu'il atteint les 200 000 $. Pourquoi est-il alors considéré comme élevé? Parce qu'il l'est. Mais ce n'est pas du tout le cas d'un salaire de 60 000 $ par année. Ce n'est qu'à ce niveau que le taux d'imposition atteint les 50 p. 100. N'oublions pas non plus qu'il s'agit de dollars américains. Nous nous demandons pourquoi nous avons des problèmes au chapitre de la productivité et de l'épargne. Le taux d'épargne est deux fois plus faible ici qu'il ne l'est aux États-Unis. Cela ne peut qu'entraîner des conséquences sur la productivité et les petites entreprises.

Tout ce que je peux ajouter avant de terminer mon discours, parce que j'en arrive à la fin, c'est que pendant que nous dépensons un milliard de dollars pour tenter de sauver Radio-Canada, nous perdons notre équipe professionnelle de hockey. Le hockey professionnel est une source d'inspiration pour les jeunes Canadiens de partout au pays, garçons et filles, qui rêvent de jouer au hockey. Il n'y a rien qui unisse notre pays autant que le hockey, ce sport magnifique que nous pratiquons sur la glace des étangs, des ruisseaux et des rivières ainsi que dans les stades du monde entier. Il me semble beaucoup plus utile d'investir dans le hockey que dans une station de télévision de Radio-Canada parce que ce sport est important pour notre pays. Il sera de toute façon possible de suivre ces parties car elles seront retransmises par CTV.

Le réseau TSN a plus d'influence culturelle au Canada que la SRC. Il diffuse les jeux de niveau junior et les jeux universitaires. C'est lui, et non la SRC, qui nous donne de la culture. Il nous donne tous les sports dont la SRC a fait fi au cours des années. Nos jeunes passent beaucoup plus souvent aux postes privés qu'à ceux que nous subventionnons à raison de 1 milliard de dollars. Le hockey junior ne passerait jamais à la SRC, mais il passe à TSN. Le volley-ball et le hockey universitaires passent aux réseaux des sports, pas à la SRC.

Franchement, honorables sénateurs, aucun Canadien ne s'ennuiera de la SRC.

Paul Martin nous a présenté un budget qui devrait nous décevoir beaucoup et nous devrions nous préoccuper grandement de ce que nos impôts et notre fiscalité font au Canada Nous devrions nous préoccuper beaucoup de nos jeunes - nos enfants et nos petits-enfants - et nous devrions prendre des mesures pour qu'ils arrivent à faire carrière au Canada au lieu d'avoir à traverser la frontière ou l'océan.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, j'ai dit hier que j'avais des éclaircissements à demander au sénateur Tkachuk. J'ai trois questions à lui poser, en fait.

Permettez-moi de commencer par la moins importante des trois. Il a dit hier - et il a répété aujourd'hui - que, à cause des impôts élevés, l'épargne est faible au Canada, ce qui fait que certains Canadiens quittent le Canada pour les États-Unis. N'est-il pas vrai, toutefois, que l'épargne est à son plus bas niveau aux États-Unis? Cela signifie-t-il que les impôts y sont trop élevés? Si l'épargne est faible au Canada, pourquoi des Canadiens iraient-ils aux États-Unis, où l'épargne est encore plus faible, semble-t-il?

Le sénateur Thachuk: Honorables sénateurs, le taux d'épargne aux États-Unis est le double du nôtre. Je ne m'attends pas à ce que notre taux d'épargne soit supérieur à ce qu'il a été puisque les taux d'intérêt sont plus bas, ce qui est une bonne chose. Par ailleurs, notre taux d'épargne actuel est la moitié de ce qu'il est aux États-Unis. Contrairement à ce que le sénateur Stewart a suggéré, je n'ai pas dit que c'était la raison pour laquelle les gens quittaient le Canada. Je pense que le taux d'épargne est un indicateur économique très révélateur car il permet de savoir si les gens peuvent mettre de l'argent de côté pour plus tard, argent que d'autres peuvent emprunter, qui fait que les banques existent et qui déclenche une réaction en chaîne positive grâce à son effet multiplicateur. Notre taux d'épargne est la moitié de ce qu'il est aux États-Unis. C'est tout ce que j'ai dit. Je n'ai pas dit que c'était la raison pour laquelle les gens quittaient le Canada.

Le sénateur Stewart: J'aimerais que l'honorable sénateur me communique, dès qu'il le pourra, sa documentation sur les taux réels. Il semble dire que le taux d'épargne au Canada est faible parce que les gens n'ont pas d'argent. Il se pourrait que certains dépensent l'argent qu'ils ont en vacances en Floride, pour ne donner qu'un petit exemple. Je ne crois pas qu'on puisse tirer de telles conclusions du taux d'épargne, même si c'est un élément de preuve.

Permettez-moi de passer à ma deuxième question, honorables sénateurs.

Dans son discours d'hier, le sénateur a constamment dénoncé le fardeau fiscal élevé au Canada, fardeau qui revêt diverses formes comme les taxes sur l'essence, et cetera. Tenons-nous-en aux impôts fédéraux. Si nous maîtrisons le déficit et la dette, lequel des principaux programmes de dépenses le sénateur abolirait-il? Par exemple, voudrai-t-il abolir le programme de péréquation? Je viens de la Nouvelle-Écosse, et cette province est tributaire de la péréquation. Le sénateur vient de la Saskatchewan; j'imagine que sa province ne dépend pas de la péréquation. Que dire de l'assurance-maladie? Je présume qu'il faudrait supprimer cela, ainsi que l'aide à l'enseignement postsecondaire. Je vais m'en tenir à ces trois programmes. Quel est l'envers de la médaille? Où le sénateur réaliserai-t-il les économies qui permettraient de réduire les impôts de façon draconienne?

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, il y a un certain nombre d'années, j'ai publié une liste des ministères que je voulais voir supprimés, liste assortie des subventions et contributions qui leur sont versées. J'étais aussi d'avis qu'on pouvait réduire considérablement la taille de la fonction publique. Le gouvernement actuel a pris des mesures à cet égard, et notre pays ne semble pas en avoir trop souffert. Cependant, je ne crois pas qu'une réduction des impôts soit synonyme d'une baisse des recettes. Aux États-Unis, le président Kennedy a prouvé qu'en diminuant les impôts, il augmentait les recettes. Le président Ronald Reagan a diminué les impôts et considérablement accru les recettes aux États-Unis. Lorsque le président Bush a haussé les impôts en pleine récession, il a aggravé la récession. Contrairement aux libéraux, je ne crois pas que l'argent que l'on prend au gouvernement disparaît. Il va dans les poches des gens. Il demeure dans notre pays et contribue au produit national brut; il est dépensé plus utilement de cette façon que s'il est transféré au gouvernement et dépensé ailleurs.

Le sénateur Stewart: Le sénateur dit que le déficit et la dette ont baissé plus rapidement aux États-Unis qu'au Canada. Cela s'explique-t-il par l'effet des retombées dont vous parlez?

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, je ne laisse rien entendre, si ce n'est que les impôts sont trop élevés. Des gens votent avec leurs pieds. Ils quittent le pays. Cette situation préoccupe les parlementaires, les parents et les habitants de partout dans le pays. Pourquoi des gens quittent-ils le pays? Quittent-ils le pays parce qu'ils espèrent trouver un meilleur pays où vivre? Je ne le crois pas. Ils le quittent pour des raisons économiques, et en partie parce que le Canada est une des économies occidentales où les impôts sont les plus élevés.

Le sénateur Stewart: Le sénateur admettra certainement que certains grands centres qui s'appuient sur de longues traditions offrent des possibilités qui attirent certaines personnes. Par exemple, je présume qu'un acteur canadien pourrait être très attiré par Hollywood, ou qu'une personne qui s'intéresse au théâtre voudrait se rendre à Londres. Comme la population de notre pays est dispersée, je ne crois pas qu'il soit bien étonnant que des gens qui désirent jouer dans «les grandes ligues» se rendent dans les centres où elles se trouvent. Le sénateur semble penser que c'est répréhensible, mais ce n'est pas la raison pour laquelle j'ai pris la parole pour la troisième fois.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Stewart, nous nous engageons dans un débat. Il serait préférable que des questions soient posées directement.

(1640)

Le sénateur Stewart: Honorables sénateurs, je voudrais poser une autre question.

Quand on parle de la dette, ne devrait-on pas tenir compte du taux d'inflation des dernières années? Peu importe leur allégeance, les gouvernements avaient l'habitude de s'endetter pour en tirer un avantage monétaire - autrement dit, comme neige au soleil, la dette diminuerait sous l'effet de l'inflation. Nous luttons contre l'inflation, mais, ce faisant, nous compliquons la tâche des gouvernements, tant au Canada qu'aux États-Unis, qui veulent s'attaquer à leurs dettes. Il est inévitable que des difficultés surviennent. Je n'ai pas entendu le sénateur en parler. Il a défendu plusieurs arguments, de sorte que je ne peux vraiment pas lui en vouloir. Cependant, dans son analyse, il devrait tenir compte de cet aspect très important.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, j'aurais pu m'arrêter là-dessus 90 minutes, mais on ne m'avait accordé que 15 minutes. Grâce à la sollicitude du Sénat, j'ai pu parler quelques minutes de plus. J'aurais pu traiter de tous ces problèmes.

Je ne suis pas économiste. Tout ce que je sais, c'est que l'Alberta a les impôts les plus faibles au Canada, alors que la Saskatchewan a certains des impôts les plus élevés au Canada. Or, la Saskatchewan a perdu 4 000 emplois l'an dernier, tandis que l'Alberta affichait un gain net de 50 000 emplois. Le Manitoba, où les impôts sont moins élevés, a gagné 20 000 emplois. L'Ontario, qui était il y a quelques années un grand invalide sous les gouvernements néo-démocrate et libéral, est maintenant une des économies les plus solides et enregistre un gain net sur le plan des emplois. Il y a là, à mon avis, une leçon à tirer pour le gouvernement fédéral et pour Paul Martin, qui devraient prendre ces faits en considération.

L'honorable Pierre De Bané: Honorables sénateurs, mon honorable collègue semble être très frappé par le fait que de 15 000 à 20 000 Canadiens, des diplômés d'université notamment, émigrent chaque année aux États-Unis. Il ne semble cependant pas être frappé par le fait qu'un nombre à peu près identique de diplômés d'universités américaines émigrent au Canada. Ce mouvement se fait dans les deux sens.

Le sénateur Stewart a dit que nous pouvions réduire les impôts au Canada, mais quels programmes supprimeriez-vous? Il a soutenu que la province du sénateur ne bénéficie pas des paiements de péréquation. Or, elle en bénéficie bel et bien. Je vois de ce côté-là de la Chambre mon excellent collègue, le sénateur Simard, un ancien ministre des Finances du Nouveau-Brunswick, qui peut vous expliquer l'importance de ce concept. Je vois également de ce côté-là mon excellent collègue, le sénateur Keon, un des chirurgiens cardiaques les plus compétents d'Amérique du Nord. On lui a offert des millions pour exercer sa profession aux États-Unis, mais il a refusé en disant qu'il voulait travailler au Canada. Il y a d'autres valeurs qui cimentent notre société.

Mon honorable collègue a cependant raison de dire que nous devons avoir un système qui encourage l'initiative personnelle et qui crée une société plus humaine, axée sur des valeurs centrales.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, j'ai passé en revue tous les impôts et toutes les taxes que nous avons et je me suis moqué de certains d'entre eux. J'ai tenté de montrer que le couteau du fisc taillait profondément dans les salaires des citoyens canadiens.

Les gens parlent des valeurs humaines et des valeurs des Canadiens. Je ne suis pas en désaccord avec ces valeurs. J'aime ce pays, et c'est pourquoi je prends la parole aujourd'hui. Je ne souhaite pas désunir le pays. Toutefois, ma pensée diffère légèrement. Les libéraux semblent s'exprimer comme si l'argent appartenait au gouvernement. J'estime pour ma part que cet argent appartient à la population du Canada et qu'il faut toujours fournir des justifications lorsqu'on vient le puiser dans les goussets des Canadiens pour le dépenser ailleurs. Lorsque les taxes atteignent 50 p. 100 sur un salaire de 59 000 $, il est temps que les gouvernements justifient pourquoi ils soutirent tant d'argent à la population du Canada. C'est tout à fait inéquitable.

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, je tiens à poser une question à mon honorable collègue au sujet de ses principes économiques qui tiennent du vaudou. J'ai de la difficulté à les comprendre, sauf pour ce qui est du fait qu'il n'impose pas les riches. Il semble dire que nous devrions puiser notre argent chez les pauvres parce qu'ils ne savent pas quoi en faire de toute façon.

J'ai écouté avec intérêt sa déclaration. Il a mentionné que le hockey est un grand sport et devrait être subventionné et que Radio-Canada laisse à désirer et ne devrait pas l'être. Toutefois, il écoute toujours le réseau TSN, qui est un réseau américain qui diffuse notre sport national. Mon honorable collègue est fort heureux de cette situation. Il a mentionné qu'il serait prêt à ce que l'on confie le hockey à CTV.

Mon honorable collègue d'en face croit-il que la loi devrait être modifiée de façon à permettre aux Américains d'acheter CTV et de le rendre semblable à TSN, afin que nous puissions ensuite écouter des matchs de hockey subventionnés?

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, je suis perdu. L'honorable sénateur crée de toutes pièces des choses qui ne figuraient pas dans mon discours et, de plus, je ne comprends pas sa question.

Sénateur Taylor, il faut bientôt nous diriger vers l'Ouest.

Le sénateur Taylor: Honorables sénateurs, je pourrais répéter ma question, mais quelque chose me dit que mon collègue ne la comprendrait pas la deuxième fois non plus.

[Français]

L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, lorsque le ministre des Finances, l'honorable Paul Martin, a annoncé que le gouvernement fédéral avait finalement éliminé le déficit budgétaire, il a également laissé entendre que le gouvernement ne reprendrait pas ses habitudes dépensières et ne poursuivrait plus les politiques en raison desquelles l'État s'était endetté de façon chronique. Si seulement il avait raison!

En fait, le budget fédéral de 1999 est un retour aux vieilles habitudes, et ce, à bien des égards. Ce qui est nouveau, c'est que le ministre a créé un paravent qui masque ce revirement. Les budgets fédéraux n'ont jamais autant manqué de transparence que celui-ci. Comme nous le savons tous, une fois que la transparence est partie, la responsabilité est également en voie de disparaître.

L'un des aspects du budget pour lequel le gouvernement fédéral se félicite est l'adoption de prévisions économiques prudentes et d'une réserve pour éventualités. Mais ce qui passait pour une précaution est désormais jugé, par les cyniques, comme étant du «tripatouillage de comptes» devant permettre au ministre de dissimuler le véritable état des finances publiques et, ainsi, de manipuler le résultat net du budget en fonction des besoins du gouvernement.

Honorables sénateurs, comme vous l'aurez constaté, j'ai des problèmes d'élocution que je souhaite temporaires. Et, tel qu'agréé par la direction des deux partis politiques en cette Chambre, j'aimerais inviter mon collègue du Nouveau-Brunswick, le sénateur Kinsella, à terminer la lecture de mon texte.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, étant donné les circonstances dont l'honorable sénateur Simard m'a parlé, le sénateur Kinsella, avec l'approbation du Sénat, pourrait continuer ce discours. La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition-prenant la parole au nom de l'honorable sénateur Simard): Honorables sénateurs, nous savons tous que, même si le ministre prévoit un budget équilibré pour l'exercice à venir, en fait, il y aura un excédent se situant aux alentours de 8 à 10 milliards de dollars; plus personne n'est dupe. Malheureusement, il se sert du budget pour dépenser la majeure partie d'un excédent de manière à prouver l'exactitude de ses prévisions budgétaires ultérieures.

L'économie du Nouveau-Brunswick, comme celle du reste du Canada atlantique, a eu tendance à traîner derrière celle du reste du pays, et cela n'est pas différent aujourd'hui. Selon une étude récente publiée par le Service des études économiques de la Banque de Montréal, la croissance économique cumulative du Nouveau-Brunswick, pour la période allant de 1998 à 2000, devrait être inférieure de deux points de pourcentage à celle de l'ensemble du Canada. Par rapport au PIB de 1998, cela représente une perte de 360 millions de dollars en production. Par comparaison à celles de l'économie ontarienne, les perspectives concernant l'économie du Nouveau-Brunswick sont encore plus sombres. La différence de taux de croissance devrait atteindre 4,6 p. 100 après trois ans. Par suite de cet état de fait, le taux de chômage au Nouveau-Brunswick ne sera pas inférieur à 11,4 p. 100, même en l'an 2000. Cette année-là, le taux de chômage devrait être supérieur de 44 p. 100 à la moyenne nationale, ce qui est d'ailleurs déjà le cas.

Ce qui est plus important toutefois, c'est la conclusion à laquelle arrive la Banque de Montréal, à savoir que, pour la première fois depuis la Deuxième Guerre mondiale, la population du Nouveau-Brunswick est en déclin. Les conditions démographiques de la province ne devraient pas s'améliorer sensiblement à court terme.

À maints égards, cette situation démographique reflète le mauvais état de santé de l'économie et le pessimisme quant à l'avenir de la province. Les habitants du Nouveau-Brunswick quittent leur province car ils estiment que les débouchés sont meilleurs ailleurs. Les Canadiens du reste du pays et les étrangers, du reste, ne sont pas attirés par le Nouveau-Brunswick.

Malgré les efforts des entreprises locales et du gouvernement provincial, certains facteurs font obstacle aux politiques conçues pour inverser cette perception négative. Quels sont ces facteurs?

Le premier facteur entravant l'essor et le développement économiques est le régime fiscal. La croissance économique est nourrie par l'innovation, et l'innovation est une entreprise intrinsèquement risquée. Or, le système fiscal est hostile au risque. Non seulement les taux d'imposition du revenu personnel au Canada - qui consomment 30 p. 100 du PIB de plus qu'aux États-Unis, notre principal concurrent pour les biens et services, le capital et la main-d'9uvre - sont élevés, mais le taux d'imposition des gains en capital a de plus augmenté régulièrement au cours des 10 dernières années. Dans les années 80, la proportion des gains en capitaux qui étaient inclus dans le revenu imposable était de 50 p. 100, contre 75 p. 100 aujourd'hui. Cela signifie que l'impôt sur les gains en capital auquel les entrepreneurs et les innovateurs sont assujettis au Canada est pratiquement le double de celui pratiqué aux États-Unis. C'est pourtant cet esprit d'entreprise et cette volonté d'innover qui sont primordiaux pour les provinces comme le Nouveau-Brunswick. On peut certes parler de la réussite de McCain Foods Ltd. et des 750 millions de dollars investis par Irving Oil dans la raffinerie de Saint John, mais combien de projets similaires ont été étouffés par la politique fiscale du gouvernement fédéral?

Les provinces comme le Nouveau-Brunswick, dont le potentiel fiscal est relativement faible, auront toujours des taux d'imposition supérieurs à la moyenne. Mais il n'est pas nécessaire que ces taux soient excessifs. Si les taux d'imposition sont excessifs au Nouveau-Brunswick, c'est en raison du niveau élevé de l'impôt fédéral. Voyons un peu.

Examinons tout d'abord le rôle de l'inflation sur le système fiscal. Même si le système fiscal est partiellement indexé, c'est-à-dire qu'il protège les Canadiens contre les hausses générales de prix supérieures à 3 p. 100 par an, le système d'imposition du revenu des particuliers n'est pas indexé en réalité, puisque le taux d'inflation est très faible depuis 1992. Or, des taux d'inflation même faibles contribuent à alimenter les coffres de l'État. Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l'indexation partielle opérée depuis 1988 s'est soldée par un relèvement effectif de 13 p. 100 du taux d'imposition fédéral. Elle a triplé le taux d'imposition moyen pour les particuliers touchant des revenus annuels inférieurs à 10 000 $ et a augmenté le taux d'imposition moyen d'un tiers pour ceux gagnant entre 10 000 $ et 25 000 $ par an. Toujours par suite de cette indexation partielle, 1,4 million de particuliers à faible revenu doivent désormais payer des impôts, et 1,9 million de personnes se trouvant dans la tranche d'imposition inférieure sont passées dans la tranche médiane. Cette tranche, assortie d'un taux de 26 p. 100 au niveau fédéral, signifie un taux d'imposition marginal pratiquement identique à celui perçu sur les revenus les plus élevés, qui est de 29 p. 100.

[Traduction]

(1650)

Cette indexation partielle est une véritable mine d'or pour le gouvernement fédéral. Elle permet à celui-ci de percevoir, de façon dissimulée, plus de 8 milliards de dollars par année.

Bien entendu, le gouvernement a pris certaines mesures pour alléger le fardeau fiscal des Canadiens. Il a relevé le montant de revenu exonéré d'impôt pour les particuliers et les familles et a prétendu que les relèvements du crédit personnel de base et la réduction d'impôt fédéral du conjoint sont plus avantageux que le rétablissement de l'indexation complète. Cela est vrai, mais le gouvernement ne dit pas tout. Ses mesures ne compensent qu'en partie l'effet de l'inflation sur le système fiscal et ne touchent pas les seuils auxquels sont établies les tranches d'imposition plus élevées.

[Français]

C'est cette imposition cachée qui entrave la création d'emplois et empêche l'ensemble du Canada, mais essentiellement les régions les plus pauvres, de réaliser leur plein potentiel. Par ailleurs, le fait que les mesures d'allégement fiscal annoncées dans le budget n'entrent pas en vigueur avant le 1er juillet 1999 laisse entendre que le gouvernement reconnaît malgré tout que le niveau élevé des impôts constitue un problème. De plus, les réformes du RPC, adoptées il y a un an, combinées à la réduction excessivement lente des cotisations d'assurance-emploi, ont eu pour effet d'accroître le coût de l'embauche. Le fait que les deux taxes ont un effet disproportionné sur les travailleurs à faible revenu signifie que les effets négatifs toucheront davantage le Canada atlantique que le reste du pays.

[Traduction]

Pendant que le gouvernement continue de s'acharner ainsi sur les gens de l'Atlantique, voilà que l'on entend des voix suggérant que les équipes de sport professionnelles ayant des franchises au Canada bénéficient d'un traitement favorable face à l'impôt. Ce qui revient à dire qu'on demande aux gens de l'Atlantique de payer pour le maintien d'équipes de millionnaires à Ottawa, à Toronto ou ailleurs. C'est de la folie pure!

Il y en a, comme M. Rob Bryden, propriétaire des Sénateurs d'Ottawa, qui disent que les équipes professionnelles demandent tout simplement à être traitées comme d'autres industries qui profitent d'allégements fiscaux. Avant de se comparer au secteur industriel, les gens du monde du sport professionnel devraient peut-être réfléchir sur le fait que ces industries créatrices d'emplois contrôlent leurs dépenses et contrôlent les salaires de leurs employés.

(1700)

Je me suis bien documenté sur cette question. J'ai lu plusieurs rapports sur le sujet, dont le rapport du comité parlementaire présidé par M. Dennis Mills. Je pense tout de même sincèrement que la question mérite d'être discutée plus à fond, pour déterminer le rôle que pourrait y jouer le gouvernement, s'il y a lieu. Par exemple, je ne suis pas nécessairement contre le fait que les municipalités où évoluent ces équipes prennent des mesures particulières si elles jugent leurs retombées importantes.

Mais il ne faudrait surtout pas que, sans approfondir le dossier davantage, le gouvernement cède devant les pressions de ces lobbyistes alors qu'il tarde encore à régler les problèmes de fond de l'économie canadienne, particulièrement le désavantage historique dont souffrent l'économie et les gens de l'Atlantique.

[Français]

Réformer le système d'assurance-emploi pour le rendre plus efficient et réaliser des économies est une chose. Mais, lorsque le gouvernement ne réduit pas les cotisations d'assurance-emploi à mesure que diminuent les coûts du programme, il ne fait qu'exploiter un programme conçu pour aider les travailleurs de manière à se ménager davantage de marge de manoeuvre dans le domaine budgétaire. Comme M. Yvon Godin, député d'Acadie-Bathurst, l'a si bien dit, le gouvernement a converti un fonds en fiducie en une caisse électorale. Un témoin l'a bien résumé:

Le gouvernement a tort lorsqu'il dit que les travailleurs dépendent de l'assurance-emploi. En fait, c'est plutôt le ministre des Finances, Paul Martin, qui dépend du fonds de l'assurance-emploi, parce que, sans lui, le déficit serait toujours là et son budget afficherait un déficit et non pas un excédent.

Dégageant un excédent de plus de 20 milliards de dollars, la caisse de l'assurance-emploi continue de croître sans aucune raison valable, simplement parce que le gouvernement est devenu dépendant des revenus que ce programme génère chaque année. Comme M. Godin le fait remarquer, cette caisse reçoit davantage de fonds que les chômeurs du pays. Qui pourrait prétendre que c'est là le but pour lequel elle a été créée?

Permettez-moi d'ailleurs de féliciter les députés Yvon Godin et Angela Vautour, du Nouveau Parti démocratique, pour les efforts qu'ils déploient à la défense de leurs concitoyens du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Si nous espérons un jour régler les problèmes économiques de cette région du pays, il faut absolument la concertation de tous les partis politiques, de tous les niveaux de gouvernement, fédéral, provincial et municipal, des gens d'affaires et des syndicats.

Je profite d'ailleurs de l'occasion pour proposer la tenue d'un sommet économique de l'Atlantique, qui réunirait tous les intervenants du milieu en quête de solutions globales et durables aux problèmes socioéconomiques de cette région du pays. C'est ensemble que nous trouverons ces solutions.

[Français]

Comme je l'ai déjà dit, le fardeau fiscal des habitants du Nouveau-Brunswick est lourd, du fait surtout des impôts à verser au gouvernement fédéral. Les impôts provinciaux sont également plus lourds qu'ils ne devraient l'être, en raison du recul notable des transferts fédéraux aux provinces, lesquels doivent être compensés soit par une hausse des transferts aux provinces, soit par une baisse des dépenses de programmes. On parle beaucoup de l'augmentation des transferts au titre des soins de santé, de 11,5 milliards de dollars, et de la hausse des paiements de péréquation annoncées dans le budget. Pourtant, les provinces recevront bien moins à l'avenir en transferts que par le passé. En 1993-1994, par exemple, le Nouveau-Brunswick avait touché 760 millions de dollars au titre du FPE et du RAPC. En 2003-2004, cette province n'obtiendra que 746 millions de dollars en vertu du TCSPS. Si l'on ne tient compte que de la composante espèces de ces transferts, la province recevra, en 2003-2004, 28 p. 100 de moins qu'en 1993-1994.

Il est essentiel qu'un gouvernement national s'engage vis-à-vis de l'essor et du développement économiques de la nation toute entière. Le gouvernement en place n'a pas honoré cet engagement. Par ses mesures de compressions budgétaires, il a imposé un fardeau énorme aux provinces atlantiques. Le gouvernement fédéral a abandonné son rôle de chef de file sans équiper les gouvernements provinciaux des outils nécessaires pour pouvoir reprendre le flambeau. Cela est véritablement ironique car, en 1993, cette région n'a voté que pour des députés libéraux, à l'exception d'un seul. En échange, le gouvernement fédéral a trahi les électeurs de la région, puisqu'il a retiré des centaines de millions de dollars, n'a fourni aucune mesure visant l'essor de la région et a refusé aux gouvernements locaux les moyens de résoudre le malaise économique.

[Traduction]

Le gouvernement fédéral utilise à mauvais escient le concept de budgétisation prudente, si bien que les Canadiens ne savent plus quel est l'état actuel des finances publiques. Ce qui est plus important toutefois, c'est que l'approche adoptée par le gouvernement, censée réduire au minimum l'excédent à la fin de l'exercice, fausse les priorités du gouvernement, conduisant par le fait même à de mauvaises politiques économiques.

En un sens, le ministre des Finances est devenu le bureaucrate parfait. Nous avons tous entendu parler de ministères aux poches bien remplies à la fin d'un exercice déployant des trésors d'imagination pour dépenser leurs fonds, sous peine de les voir disparaître. Les bureaucrates dépensent les deniers publics de façon inefficace et déraisonnable sans tenir compte des objectifs des politiques publiques qu'ils sont censés promouvoir. En fait, ils dépensent parce qu'ils ont des fonds à dépenser.

Le ministre fait exactement la même chose, mais avec des sommes beaucoup plus considérables. L'an dernier, il a injecté 5,5 milliards de dollars en programmes de dépenses ponctuels pour que l'excédent continue de se situer à 3,5 milliards de dollars. Pour ce faire, il a affecté 2,5 milliards de dollars au Fonds des bourses du millénaire, 800 millions de dollars aux victimes de l'hépatite C, 350 millions de dollars à la stratégie de guérison autochtone et 1,8 milliard de dollars à la modification des pratiques comptables utilisées dans le domaine de l'aide aux institutions financières internationales.

Cette année, il recommence. Il a ajouté des dépenses ponctuelles s'élevant en tout à 4,2 milliards de dollars au budget de 1999 pour l'exercice 1998-1999. Cette somme comprend 3,5 milliards de dollars au titre du complément au Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, dont pas un sou ne sera versé aux provinces au cours du présent exercice. À cela, il a adjoint 200 millions de dollars pour la Fondation canadienne pour l'innovation, 200 millions pour d'autres initiatives en santé, 200 millions au titre de l'aide internationale et 100 millions pour d'autres dépenses.

Avant d'annoncer son budget, le gouvernement a déclaré qu'il dépenserait 1 milliard de dollars supplémentaires, soit 400 millions de dollars au titre du Programme d'adaptation et de restructuration des pêches canadiennes et 600 millions de dollars pour le Programme d'aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole.

Certains de ces programmes sont peut-être valables, mais ils n'ont pas été mis en place en raison de leur urgence ou de leur efficacité. Ce qui compte, c'est leur effet sur le résultat net du budget. Ces mesures ponctuelles représentent plus de 5 milliards de dollars en moyenne par an. Elles visent expressément à diminuer des excédents prébudgétaires relativement importants, même si les fonds ne seront effectivement versés aux particuliers, aux institutions ou aux provinces que plusieurs années plus tard. Comme l'Institut C.D. Howe le fait remarquer, le gouvernement a tendance à recourir à ce type d'initiative pour faire baisser son excédent déclaré, au lieu d'alléger les impôts; il préfère procéder à des dépenses de programmes, surtout celles qu'il peut engager par l'entremise d'une fondation ou d'un fonds.

Les décisions ne sont pas prises en fonction de ce qui constitue une politique valable, mais plutôt selon ce qui produira le résultat comptable souhaité. Ce n'est sûrement pas ainsi que l'on met en place de bonnes politiques.

(1710)

En conclusion, honorables sénateurs, M. Martin répète à qui veut bien l'entendre que lui et le gouvernement Chrétien ont fait des choix, en planifiant les finances du pays. Il a raison. C'est ce gouvernement qui a choisi de gaspiller 1 milliard de dollars de l'argent des contribuables dans le fiasco de l'aéroport Pearson; c'est ce gouvernement qui a choisi d'imposer la Loi sur le contrôle des armes à feu, dont la facture atteint maintenant 300 millions de dollars, et grimpe toujours, alors qu'elle ne devait pas dépasser 60 millions de dollars; c'est ce gouvernement qui a choisi d'annuler le contrat d'achat d'hélicoptères, pour des motifs purement sectaires et électoraux, et qui a ensuite choisi d'acheter ces mêmes hélicoptères, déguisés, dilapidant du même coup des centaines de millions de l'argent des contribuables; c'est ce gouvernement qui a choisi de réduire son déficit en pillant le fonds de l'assurance-emploi et en s'accaparant plus de 20 milliards de dollars. En effet, ce gouvernement a fait des choix.

[Français]

De par leur nature, les budgets de l'État sont des documents politiques. Mais, fait encore plus important, ils ont été conçus pour tracer la trajectoire future des politiques gouvernementales, politiques qui devraient viser le mieux-être de la population et de la société.

Or, le gouvernement actuel politise toujours davantage le processus budgétaire et prend les décisions non pas en fonction du mieux-être des Canadiens, mais afin d'obtenir les résultats budgétaires que le ministre souhaite voir. C'est ainsi que nous avons un programme de réduction du déficit qui ne tient pas compte de l'incidence qu'il pourrait avoir sur les régions les plus pauvres du Canada. Nous nous retrouvons aussi avec un programme d'assurance-emploi qui gonfle les coffres de l'État plus qu'il ne gonfle les poches des chômeurs. Nous nous retrouvons avec un gouvernement qui fait effectuer une étude importante sur le régime fiscal des entreprises au Canada pour la mettre ensuite aux oubliettes simplement parce qu'elle ne fournit pas les réponses qu'il escomptait. Nous avons également un gouvernement qui déploie beaucoup d'efforts pour manipuler les livres de manière à obtenir les résultats qu'il désire.

Nous sommes maintenant, honorables sénateurs, à l'aube d'un nouveau millénaire, et un nouveau paysage budgétaire se dessine. L'endettement chronique est heureusement devenu chose du passé. Pourtant, si nous examinons le comportement de notre gouvernement, nous ne pouvons que conclure qu'il est de nouveau fortement tenté de poursuivre les politiques qui nous ont menés aux problèmes budgétaires que nous savons.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, au nom du sénateur Graham, le débat est ajourné.)

[Traduction]

La région Asie-Pacifique

Le rapport du comité des affaires étrangères-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Stewart, attirant l'attention du Sénat sur le huitième rapport du comité sénatorial permanent des affaires étrangères intitulé: «La crise en Asie: répercussions sur la région, le Canada et le monde.»-(L'honorable sénateur Andreychuk).

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, comme nous en venons à l'interpellation no 50, je voudrais dire que j'estime que cette interpellation sur le huitième rapport du comité sénatorial permanent des affaires étrangères intitulé La crise en Asie: répercussions sur la région, le Canada et le monde est important en ce moment. Il y a un sénateur qui veut prendre la parole là-dessus. Cette interpellation est inscrite au nom du sénateur Andreychuk.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Affaires étrangères

La politique et les intérêts du Canada en Russie, en Ukraine et dans la région de la mer Caspienne-Autorisation au comité d'examiner la question-Amendement de l'avis de motion

L'ordre du jour appelle:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à examiner la politique et les intérêts du Canada concernant la Russie, l'Ukraine et la région de la mer Caspienne;

Que le comité ait le pouvoir de recourir aux services de conseillers, de spécialistes, d'employés de bureau et de tout personnel qu'il jugera nécessaire pour effectuer les travaux définis dans l'ordre de renvoi;

Que le comité ait le pouvoir de se déplacer à l'intérieur et à l'extérieur du Canada; et

Que le comité présente son rapport final au plus tard le 31 mars 2000; et que le comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenu dans son rapport final et ce, jusqu'au 22 avril 2000.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, je voudrais demander à Votre Honneur de supprimer les deuxième et troisième paragraphes du projet de motion. Après suppression de ces deux paragraphes, je proposerai la motion.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, il est proposé par l'honorable sénateur Stewart, appuyé par l'honorable sénateur Pépin:

Que le comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à examiner la politique et les intérêts du Canada concernant la Russie, l'Ukraine et la région de la mer Caspienne;

Que le comité présente son rapport final au plus tard le 31 mars 2000; et que le comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenu dans son rapport final et ce, jusqu'au 22 avril 2000.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mardi 23 mars 1999, à 14 heures.)


Haut de page